Teradélie – ZaRoots
Teradélie
Autoproduction
Teradélie est une artiste singulière qui semble obsédée par la syllabe « Za », le seul dénominateur commun entre tous ses albums. Evoluant dans un univers mobile qui bouscule les codes, elle se refuse à être enfermée dans une case. Ainsi, naviguant contre vents et marées, elle foule des terres peu explorées dans le paysage musical français, et le dernier opus en date ne déroge pas à la règle. Comme le titre de l’album le laisse supposer cependant, un recentrage se fait autour des musiques traditionnelles. Les guitares sèches sont en effet très présentes, une flûte hypnotisante s’invite sur le tropical « In A Way », et des arabesques émaillent le saharien « Exilia ». Par ailleurs, les musiques traditionnelles américaines sont à l’honneur. En effet, la guitare slide de Jipes et le melodica de Teradélie offrent des accents « country » au vivifiant « The Last Deal », mais également à la magnifique ballade onirique « Lulla ».
Plus loin, sur l’entraînant « Lili », composé en collaboration avec le parolier de talent Eric Grünenwald, c’est le swing du « walking bass » de Daniel Collet qui côtoie le rock’n’roll de la guitare de l’autre invité In-Mobile et le doo wop des voix d’accompagnement. Enfin, « Je Tire Ma Révérence » nous subjugue de sa folk à la fois reposante et intrigante. Nonobstant ces éléments « roots », on baigne par ailleurs dans un monde plein de fantaisie (militaire avec le néanmoins enchanteur « Astrées », insouciante avec l’éloquent « Le Paradigme », ou encore amère avec le déglingué « 7 H 08 », symptôme d’un mal-être dans un monde professionnel de plus en plus contrôlé et se rapprochant en cela de l’univers du « Brazil » de Terry Gilliam).
On notera quelques clins d’oeil à Led Zeppelin (l’alternance acoustique/électrique de « Highway » rappelle fortement « Babe I’m Gonna Leave You », là où les voix haut perchées de « The Last Deal » convoquent irrémédiablement l’esprit de Robert Plant). Côté voix justement, Teradélie continue à jouer la carte de la versatilité, taclant aussi bien Stina Nordenstam dans sa fragilité (« Lulla ») que Marlene Dietrich dans ses épanchements suaves (« Lili »). Elle peut également adopter le style déclamatoire d’Anne Clark (« Je Tire Ma Révérence »). Par ailleurs, même si elle peut s’emporter à la manière de Nina Hagen, elle se hasarde aussi dans les limbes fantaisistes de Kate Bush (« 7 H 08 »).
Enfin, notre artiste atypique nous surprend avec un lyrisme tout droit hérité de Lisa Gerrard (« Astrées »). La version physique de l’album propose en bonus une très belle reprise de la version orchestrée du « San Jacinto » de Peter Gabriel. La Lilloise à l’imagination débordante a su en faire ressortir le thème principal (la condition des Indiens d’Amérique) en associant au chant principal un accompagnement mimant les chants des natifs du nouveau monde. Assurément un grand moment d’émotion.
Teradélie frappe donc à nouveau un grand coup avec « ZaRoots ». Multi-instrumentiste de talent (elle joue aussi bien du tuba, que du violoncelle, du melodica et des claviers, en plus d’assurer les programmations de batterie), l’enthousiaste touche-à-tout continue à nous transporter dans un monde tour à tour truculent et intimiste où l’imprévisible est de mise.
Lucas Biela (10/10)
Pour écouter et télécharger l’album :
https://teradelie.bandcamp.com/album/zaroots
Très gros coup de cœur ! Un artiste qui mériterait tellement plus de visibilité, à découvrir !! 🙂