Steve Hackett – Wuthering Nights: Live In Birmingham

Wuthering Nights: Live In Birmingham
Steve Hackett
Inside Out Music
2018

Steve Hackett – Wuthering Nights: Live In Birmingham

Steve Hackett Wuthering Nights

Au-delà du plaisir, chroniquer Steve Hackett s’apparente à un devoir de reconnaissance. Reconnaissance envers l’exclu, l’oublié de Genesis. Ceux qui ont vu le désolant reportage de la BBC de 2014, Genesis Together And Apart, comprendront pourquoi. Beaucoup de fans vous diront même que son départ en 1977 du célèbre groupe anglais fut plus déterminant que celui de Peter Gabriel. En effet, Wind And Wuthering son dernier album avec le groupe, marque la fin de la période glorieuse. Sur le suivant, And Then There Were Three, les trois membres restants s’orienteront vers des schémas plus courts, plus pop. Le groupe surfera sur le succès solo de Phil Collins pour remplir les stades, mais la magie n’opèrera plus, à tel point que l’aventure s’achèvera brutalement en 1997 avec le navrant Calling All Stations.

Aujourd’hui, le Grand Genesis, c’est Steve Hackett. Les autres membres se sont fourvoyés soit dans une pop tiédasse (Mike Rutherford, Phil Collins) soit dans un concept classique peu convaincant (Tony Banks). Seul Peter Gabriel fera (fait ?) une très belle carrière solo avec des albums remarquables mais assez éloignés de l’esprit Genesis. En revanche, certaines compositions de Steve Hackett auraient très bien pu figurer sur les albums des premières années. Ses témoignages en public, superbement réalisés en CD/DVD/Blu-Ray, où se mêlent sans problème des morceaux de sa carrière solo et des morceaux de Genesis le prouvent. Quel bonheur de retrouver Genesis sur scène sans que ce soit un copier/coller façon cover band du style The Musical Box. Et puis on a la guitare d’origine, et quelle guitare ! Le son de sa Fernandes (ce n’est plus sa Gibson Les Paul qu’il utilise sur scène) est incroyable, associé à une technique hors norme. Eddie Van Halen reconnaîtra même que notre ami Steve était le vrai inventeur du tapping.

Steve Hackett Wuthering Nights Band1

Wuthering Nights: Live In Birmingham célèbre le 40e anniversaire de la sortie de Wind And Wuthering avec de superbes interprétations de « Eleventh Earl Of Mar », « Blood On The Rooftops », « In That Quiet Earth », « Afterglow » et pour la première fois sur scène « One For The Wine ». Admirablement filmé par Paul Green le 1er mai 2017 au Symphony Hall de Birmingham, le concert réunit autour de Steve Hackett ses fidèles acolytes de scène et de studio, et le très demandé Nick Beggs (Steven Wilson, The Mute Gods) à la basse. Démarrage en trombe avec le classique « Every Day » et un Steve Hackett tout sourire qui fait monter la tension jusqu’au final en trio avec sa belle-sœur (mais oui !) Amanda Lehmann à la guitare et Rob Townsend au sax. La première partie du concert sera entièrement composée de morceaux de ses albums solos et notamment du dernier, The Night Siren. C’est le cas d’« El Niño » et son martellement mélodique puis de « In The Skeleton Gallery » et de « Behind The Smoke ». Ce sont ces morceaux peu joués sur scène qui ont du mal à décoller. On notera malgré tout un beau duel harmonica (SH) et sax sur « In The Skeleton Gallery ». L’ambiance est « so British » et le public plus quinqua que quadra. Vous ne verrez ni slams ni cornes façon hard rock, mais peu importe, les spectateurs sont conquis par une prestation de grande qualité. La première partie s’achève avec l’incontournable « Shadow Of The Hierophant » avec Amanda au chant. Magnifique.

Deuxième partie donc, consacrée en grande majorité à Wind And Wuthering, le dernier classique de Genesis qui préfigurait ce qu’aurait pu être le groupe dans les années 80 si Steve était resté. On n’était plus dans le côté théâtral des débuts mais la touche musicale si particulière était conservée. On ne refera pas l’histoire surtout que les trois premiers opus de Steve en solo vont largement compenser son départ. Retour au concert avec le « Onzième Comte De Mar » qui ouvre le bal de façon grandiose avec un Nad Sylvan au chant toujours aussi convaincant. Sa voix proche de celle de Phil Collins nous transporte aisément quarante ans en arrière. Tout au long du morceau, les claviers de Roger King et le sax soprano de Rob Townsend soutiennent la rythmique de Gary O’Toole. Le batteur que l’on retrouve au chant sur « Blood On The Rooftops » pour peut-être le plus beau morceau de la soirée. Une fois de plus le saxophone offre une touche de modernité aux compositions anciennes. Son intégration est la grande trouvaille de Steve Hackett qui enrichit encore plus l’univers musical de Genesis. Cela se confirme sur l’instrumental « In That Quiet Earth » où le spectacle décolle vraiment. On pressent un final de folie et on ne va pas être déçu. Tout d’abord le tonitruant « Dance On A Volcano » puis la surprise, le jamais joué « Inside And Out » (clin d’œil au label ?) tiré d’un EP de 1977, Spot The Pigeon. Puis s’enchaînent le classique « Firth Of Fifth » avec (pour moi) le plus beau solo de guitare de toute l’histoire du rock, « The Musical Box » et « Los Endos » en rappel.

Steve Hackett Wuthering Nights Band2

L’image et le son du Blu-ray sont à la hauteur du spectacle qui passe assez vite (130 minutes quand même), avec l’envie que l’aventure continue encore et toujours. Steve Hackett en est à son 25e album studio et même si certains sont un peu en-dessous, il ne s’est jamais vraiment planté. En bonus, trois vidéos clips et un passage en coulisses en toute décontraction (30 mn).

Écouter et voir Genesis sur scène, nous le devons à Steve Hackett, avec des prestations au niveau son et éclairage certainement supérieures à celles de l’époque. Pas sûr que les ados d’aujourd’hui puissent suivre leurs « stars » du moment pendant des décennies. Notre société Kleenex est bien dure et beaucoup d’artistes en font les frais. Ce triste constat ne doit pas gâcher notre plaisir d’être d’une génération où tout était encore possible. Si l’ami Steve passe près de chez vous et que vous aimez la bonne musique, il faut y aller, même sans connaître le bonhomme. Sûr que vous passerez un bon moment. Et puis moi, si j’ai pu le remettre à la place qu’il mérite, j’aurai rempli ma mission.

Thierry Folcher

http://www.hackettsongs.com/

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