Ryo Okumoto – Coming Though

Coming Though
Ryo Okumoto
2002
Inside Out

Ryo Okumoto – Coming Though

Au début des années 2000, la famille des américains de Spock’s Beard est en totale effervescence. Après la nouvelle pour le moins innatendue du départ de son mentor Neal Morse en plein quête mystique, et la parution d’un disque pop-prog assez réussi du batteur/chanteur/multi-instrumentiste Nick D’Virgilio (« Karma » en 2001), c’est au tour du claviériste fou Ryo Okumoto de se prêter à l’exercice de l’album solo. Enfin, façon de parler, quand on découvre avec stupéfaction la liste impressionnante des invités qui figurent sur « Coming Through », jugez plutôt : Bobby Kimball, Steve Lukather, Simon Philips, Neal Morse, Nick D’Virgilio, Dave Meros, Alan Morse, Glenn Hughes, Dave Carpenter, Michael Landau et Kenny Wild ! Bref, une formation haut de gamme qui réunie tout de même la dream team de Spock’s Beard au grand complet, doublée entre autres d’une partie non négligeable du line-up de Toto ! On pouvait imaginer pire pour un simple opus en solitaire non ?

Cette réunion géniale (sur le papier en tout cas !) et carrément fourre-tout illustre parfaitement le contenu indéniablement hétéroclite de notre joyeuse et détonante galette, placée sous le signe de la diversité des styles et du véritable plaisir de jouer. En effet, le bourreau frappadingue des claviers nous propose avec « Coming through » une improbable collection de 8 pièces musicales, qui donnent aussi bien dans le registre progressif symphonique que dans le jazz-rock débridé, la chanson pop, l’AOR (ou rock FM si vous préférez) de bonne facture, voir même carrément la funky music ! Bref, on est ici très loin des productions solo habituelles de tous les « keyboard’s heroes » du rock progressif. En effet, rien à voir par exemple avec le sympathique « Pinup Guru » de Thomas Bodin, qui reste voué à la simple exploitation massive de ses nombreux claviers, dans la plus pure tradition musicale des Flower Kings son groupe d’origine.

A défaut de nous faire l’étalage de sa virtuosité durant près d’une heure, l’ami Ryo opte quant à lui pour le véritable jeu de groupe, en n’usant de son statut de leader qu’avec parcimonie, et tout en choisissant de nous offrir un large panorama de ses influences et différents styles musicaux affectionnés. Ceci s’explique également du fait que notre japonais préféré est depuis très longtemps musicien de session, ce qui l’a amené à collaborer par le passé, et à de nombreuses reprises, avec toute une pléiade d’artistes. Citons pêle-mêle les plus célèbres : Phil Collins, Herbie Hancock, Eric Clapton, Aretha Franklin, Kitaro, etc. Quand je vous parlais un peu plus haut d’éclectisme ! « Coming Through » est un album réellement enthousiasmant et surprenant, à travers lequel son géniteur se lâche totalement, sans rechigner à se faire plaisir, en allant jusqu’à faire participer son jeune fils de onze ans à la batterie sur un titre ! Aussi peu cohérent dans la forme qu’il peut l’être lors d’une écoute en intégralité, « Coming Though » se délecte sans modération et défile sans le moindre temps morts ni à-coups. On passe en effet allègrement du jazz-rock en folie de « Godzilla Vs King Ghidarah » (sympathique clin d’œil à la pop-culture nippone !) à « Slipping Down » et ses chœurs tout droit sortis d’un album de Prince. Puis on enchaîne un peu plus loin avec « Highway Roller », amusant cocktail disco/rock où Glenn Hugues s’époumone avec entrain, et « Free Fall », ballade aérienne à la ligne mélodique imparable que ne renierait pas Neal Morse dans l’un de ses propres opus en solitaire.

Notons également, à l’attention des puristes du rock progressif, la présence d’un morceau de bravoure de 19 minutes intitulé « Close Enough », co-signé par Neal Morse, et interprété au chant par l’excellent Bobby Kimball. Dans ce dernier cas, on en prend en effet plein les cages à miel pour ce qui est des soli enfiévrés de mini-moog et d’orgue Hammond, sur fond de nappes de mellotron. Comme quoi vraiment tout le monde peut être satisfait avec cet album ! Voilà donc une œuvre qui apporte une nouvelle preuve du potentiel créatif des musiciens de Spock’s Beard, et qui, quelque-part, rassurait à l’époque de sa sortie sur l’avenir de ce groupe, véritable coqueluche du rock prog que certains avaient tendance à trop vite vouloir enterrer. La suite, vous la connaissez, Neal Morse alignera les chefs d’œuvres à répétition tandis que Spock’s Beard poursuivre son chemin avec certe des hauts et des bas, mais toujours le même enthousiasme qui force le respect ! Quand à l’attention de Ryo Okumoto, je n’aurai qu’une seule chose à ajouter pour conclure : Ryo IS rock’n roll !

Philippe Vallin (7/10)

http://www.ryookumoto.com/

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