Pjusk – Tele

Tele
Pjusk
2012
Glacial Movements

Pjusk – Tele

Je ne reviendrai pas sur la position que peut ou doit accorder celui qui écoute, ni sur la difficulté de la critique pour poser un jugement valable sur un système discret, et s’adressant au plus aventureux, élitistes diront certains, qui échappe comme de la fumée à toute transcription objective. Cette musique, électronique s’expérimente dans son corps et sa tête. Sa position, on la recherche comme si on devenait ces sonorités, s’étirant dans le temps. Encore un peu, et je me prendrais pour un sapin moi ! Cependant, difficile d’y aller par quatre chemins, « Tele », troisième album de ce projet Norvégien, a frappé directement mon crâne. Son premier son, son premier field recording, ses percussions de basses surpuissantes et progressives font apparaître des fjords millénaires, le froid et la beauté, expurgée du trop de trop, direct à l’essentiel. Bienvenue en hiver ! Et cet hiver, il n’est pas gris du bitume, sa neige ne bloque pas les transports, ralentissant la vie sociale.

Posée, contemplative, la musique de Pjusk est travaillée dans les moindres interstices, chaque détail est diaboliquement pensé, de la moindre modulation de reverb ou d’écho, à la création d’un espace cartographique fantasmé, nature surnaturelle, texturale. Ardu d’y apposer un autre terme. Les craquements de glace, on les capte, le vent, on le sent, comme une respiration embuée qu’on s’imagine déformée par l’environnement. Le froid, cette réalité, est palpable. Avant qu’une armée de bouclier ne se lève comme si j’étais moi-même Spartacus ! Oui, cette musique est très proche de celle d’un Biosphere, mais je dirais plus, de toute une école, ainsi que d’une approche purement nordique du son. Mais là où le célèbre norvégien se plante dorénavant à chaque sortie, Pjusk arrive à faire renaitre cette atmosphère de plénitude, mais aussi d’angoisse sourde, qui me semblait avoir disparu chez Biosphere.

Pure expérience de la solitude, « Tele » aurait bien pu ne provoquer qu’un vague remous. À mes oreilles, il ravive au contraire une flamme, une délicatesse de propos, bien qu’en ajoutant sa propre image des faits, des glitch bien sentis ou une rythmique minérale et autres tintements (comme sur « Granitt » par exemple). « Tele » représente ce que j’attendais, la chute de flocons sur un fond textural, sans tricherie, sans fainéantise d’exécution que je retrouve malheureusement bien trop souvent ailleurs, camouflé dans un sophisme de bas étage, pour rester poli.

Vue aérienne… Glacier… Tellement simple… Evident…

Jérémy Urbain (8,5/10)

http://www.pjusk.no/

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