Odd Palace – Things To Place On The Moon
Prime Collective
2018
Rudzik
Odd Palace – Things To Place On The Moon
Un titre d’album énigmatique, il n’en faut pas plus pour je pose une oreille attentive sur le cri primal et lunaire d’Odd Palace. Bien qu’un de mes collègues de la rédaction ait qualifié entre nous ce groupe d’« aussi prog que Nickelback », j’y ai trouvé plus d’inventivité que chez les Canadiens. Au-delà du titre de l’opus, c’est donc ce qui m’a incité à me fendre d’une chronique.
Things To Place On The Moon est le premier LP d’un groupe qui, par contre, possède une solide expérience de la scène en Europe. Le niveau technique des cinq Danois impressionne d’entrée. Si les refrains sont taillés sur mesure pour accrocher un auditoire plutôt mainstream (« Carnivore », « Liar’s Attire », « Dead End Filled », etc.), les parties instrumentales sont beaucoup plus travaillées avec souvent en fond sonore rythmique des arpèges de guitare de Lasse Grube comme sur « Chemical Solution ».
D’un point de vue rythmique, le schéma trop systématique basé sur l’opposition de « couplets calmes » avec des « refrains burnés » peut refléter un recours trop fréquent aux standards du rock alternatif. Sur ce point, je rejoins donc assez l’avis précité de mon collègue. Cependant, Odd Palace dépasse régulièrement ce poncif en proposant certains rythmes bien barrés confinant au djent avec le bandant « Chemical Solution » rappelant Periphery et Protest The Hero, ou aussi « Delirious ».
Bien que le groupe ne le précise pas, je citerais également comme influence Coheed And Cambria, mais surtout du fait que le chant de l’excellent Gert Boersting rappelle régulièrement celui de Claudio Sanchez (« Delirious », « The Alchemist »).
Pour revenir sur la rythmique, Morten Peetz à la batterie (« Counterpart ») et Patrick Wolffgang à la basse (« Delirious ») abattent un boulot considérable pour charpenter efficacement les dix titres de cette galette.
Impossible de passer sous silence le monument éponyme de cet opus qui propose un florilège versatile de plus de treize minutes des énormes capacités d’Odd Palace. De nombreuses parties acoustiques créent une ambiance délétère qui évolue en rugissements de colère désespérés lors de passages metal progressifs sur lesquelles les riffs de Soeren Laerkholm sont le douloureux prolongement des textes. En effet, à leur lecture, on comprend que « Things To Place On The Moon » est en fait un constat de résignation devant la déliquescence de notre vieille Terre et l’illusion qu’il faut déjà penser à ce que l’on devra emmener sur la Lune.
Dans un genre très différent, « Insomnia », titre également de l’EP sorti en 2015, représente l’autre plage la plus progressive de cet astre nocturne. Il s’agit d’une sorte de valse alanguie et chantée montant en puissance tout au long du morceau, confinant presqu’au blast beat à un certain moment pour se terminer sur un final entre heavy et jazz.
« Things To Place On The Moon » recèle donc beaucoup de trésors probablement à emmener là-haut si nous sommes amenés à y émigrer mais il reste aux Danois d’Odd Palace à s’affranchir de certains schémas chers au rock alternatif de façon à apporter encore plus d’originalité à un rock progressif rafraîchissant et d’une grande qualité technique.