Oceans 5 – Return To Mingulay
Melodic Revolution Records
2013
Oceans 5 – Return To Mingulay
Il est des rencontres où fraternité, échange d’opinions, focalisation en une approche rationnelle semblent n’avoir été uniquement conçus que pour se retrouver en une fusion, en un bien des plus précieux, à savoir : une volonté à naviguer de conserve, dans une même direction, tout en gardant un même rythme. Et de cette rencontre entre Andy John Bradford (guitare 12 cordes, voix), anglais du North Yorkshire, auteur de l’album Join The Dance sorti en 2010, remarqué par une force d’écriture où la trame est servie en une succession d’histoires courtes aux images poétiques, le tout prenant vie sous de douces mélodies aux sonorités acoustiques, aux couleurs celtico-folkloriques, et Colin Tench (guitare), membre de différents projets, comme BunChakeze, The Minstrel’s Ghost (avec un certain Zoltan Csörsz Jr. derrière la batterie… Si je vous dis Karmakanic ?… Voire The Flower Kings ?…), The Colin Tench Project et Corvus Stone, dont le premier opus éponyme regorge de titres instrumentaux où les solos de guitares suaves évoquent quelques grands noms du genre en matière de développements mélodiques soignés, de cette rencontre, donc, naquit cette envie à vouloir concevoir un tout nouveau projet. Et il est des rencontres où des mots comme partage sont des privilèges luxueux parce que rares, et propices à toutes sortes d’émulations.
Autour d’Oceans 5 (attention de ne point confondre avec cet autre groupe de Hambourg, répondant au nom voisin d’Oceans5), afin que ce projet se réalise sous les meilleures augures, le duo s’étoffe en quintette avec Marco Chiappini (claviers), également membre de The Minstrel’s Ghost et de Gandalf’s Project, Stef Flaming (basse), ici, mais multi-instrumentiste et vocaliste au sein de son bébé floydien, Murky Red, et Victor Tassone (batterie, percussions), du power trio Unified Past. Bref, ces Oceans 5 sont en quelque sorte un super-groupe, mais certainement aussi une famille, réunie autour d’une même trame fédératrice.
L’album, Return To Mingulay, disponible depuis octobre 2013, tourne surtout autour des talents de songwriter d’Andy. Aux premiers abords, l’ambiance générale évolue dans un registre très folk, en middle tempo. Mais on en oublierait presque ses origines britanniques, tant l’approche quasi électro-acoustique de son orientation folk n’est en aucun point celtique, mais tellement plus américaine. Ce pourrait presque pencher vers la folk-country s’il y avait en toile de fond des effets de sliding de pedal steel guitar.
Mais nous sommes plus dans un croisement des genres, un crossover comme on dit. On y décèle une pointe de chants de marins, mais pas à prendre au sens strict comme The Pogues pouvaient les pratiquer, non, mais comme une incitation à une danse fraternelle, à un folklorisme côtier, dont les thèmes auraient des goûts salés, nous invitant à répondre à l’appel du large, tous unis par les mêmes passions.
La voix d’Andy s’est se faire aussi chaude que celle de Steve Thorne dont l’approche d’écriture n’en est pas si éloignée également, y compris pour les mélodies vocales et les placements de chœurs. On pense aussi à l’univers de Lindsey Buckingham : certains titres pourraient très bien cohabiter avec ceux de Rumours. On y perçoit même quelques allants de Glenn Frey. Voire des clins d’œil à « Amazing Grace », ou encore à « Sailing » de Rod Stewart, sans oublier des similitudes avec les compositions de Rogers Waters.
Mais la force de ce groupe ne s’arrête pas là : la complémentarité, le contre-balancement et aussi l’équilibre vient de l’apport de Colin, tout en nuance, tout en demi-teinte, tout en subtilité. Ses plans de guitares, tant rythmiques que solistes, savent juste se faire discrètes, tout en restant omniprésentes : un peu comme si le Joe Perry de Rocks avait croisé un Steve Rothery émulant David Gilmour. À noter la présence sur le titre « 6000 Friends » de la magnifique voix de Lorelei McBroom, au CV participatif impressionnant : Pink Floyd, The Rolling Stones, Nile Rodgers, Rod Stewart (tenez, moi qui vous en parlais pas plus tard qu’il y a peu !).
Avec cet album, Oceans 5 prend le large, toutes voiles dehors, gardant le cap et déjà en vitesse de croisière, son équipage offert à un horizon ensoleillé. Il est des plaisirs simples, essentiels, comme une pause nous amenant à prendre conscience de nos priorités oubliées. Et c’est tout cela que nous ressentons avec Return To Mingulay, comme unique passeport.
Éric Salesse (8/10)