O.R.k. – Firehose Of Falsehoods
Kscope
2025
Palabras De Oro
O.R.k. – Firehose Of Falsehoods
O.R.k. a-t-il été formé pour durer ? C’est une question traditionnelle quand on a affaire à un super groupe. Il faut croire que la réponse est oui puisqu’il sort Firehose Of Falsehoods qui est son cinquième album en une dizaine d’années d’existence. Dans la foulée de la chronique de Soul Of An Octopus (écrite par notre ancien collaborateur Guillaume Beauvois), j’avais été séduit par Ramagehead dont j’avais également fait l’éloge dans nos colonnes. Il y a trois ans, je suis un peu passé à côté de Screamnasium, un opus encore bien accueilli par la critique. Il ne fallait pas que je laisse sous silence ce « lance-flammes de mensonges » qui vient me cramer la face et les écoutilles.
Qualifiés de nouveau pilier du rock progressif, O.R.k. a exploré beaucoup de styles dans ses productions précédentes. Si l’on excepte son ultime titre dont je reparlerai, Firehose Of Falsehoods recentre le sujet sur le… grunge, un genre pas spécialement en vogue, que le groupe revisite avec son background progressif et alternatif. Il faut dire que le grunge et le rock alternatif ont une certaine parenté, donc la passerelle les reliant était en quelque sorte une construction, ma foi, fort logique à imaginer.
Alors, à l’écoute de cet album, on pensera souvent à la lourdeur lancinante de Soundgarden, LEF (Lorenzo Esposito Fornasari), le vocaliste d’O.R.k., prenant régulièrement les intonations du fort regretté Chris Cornell. Par moment, la fureur d’un Pearl Jam est sous-jacente, mais pas probante. Tout ceci fait de Firehose Of Falsehoods une galette moins éclectique que les précédentes. Cette atmosphère 90’s est perceptible dès les premiers instants, tant « Blast Of Silence » pose parfaitement les bases du genre. L’alternance de la guitare acoustique avec un riff hyper puissant délivré par Carmelo Pipitone convient idéalement au chant larmoyant et torturé d’un LEF semblant possédé. « Hello Mother » enchaîne sur un tempo accéléré, sauvagement impulsé par la basse ronflante de Colin Edwin, celle qui manque tant à l’ersatz qu’est devenu Porcupine Tree. D’ailleurs, sur cet opus, on notera l’invitation faite à John Wesley, l’ancien membre de tournée de Porcupine Tree. « Hello Mother » est le morceau le plus percutant de Firehose Of Falsehoods, judicieusement placé avant l’alternatif « The Other Side », plus difficile à suivre à force de circonvolutions. LEF y glisse quelques accents bluesy sur un passage instrumental bien torturé. Jusque-là, on peut cependant se trouver en manque d’émotions devant ce patchwork grungy. « 16000 Days » y remédie singulièrement avec un refrain lyrique d’une sensibilité exemplaire et un pont chant/guitare acoustique d’une grande délicatesse. Cette ballade dramatique peu convenue est proprement épatante. « PUTFP », celle qui suit, est toute aussi efficace, quoique complètement différente. Le riff assassin et gras asséné par Carmelo Pipitone décornerait un taureau en rut. Là aussi, le pont se déguste avidement sur une accélération presque anodine de Pat Mastelotto, tout en subtilité. Le concis « Seven Arms » marie le grunge avec le bottleneck pour un rendu très étonnant, mais avec une fin en queue de poisson. Ces assortiments improbables atteignent leurs limites sur « Beyond Reach », une plage sur laquelle on ne sait pas trop où veut nous emmener O.R.k. Ses alternances entre acoustique et riff saturé, son slide de guitare très aigu et certaines intonations orientales peu réussies nous perdent en route. Fort heureusement, ce moment d’égarement est largement compensé par la somptueuse ballade « Mask Becomes The Face » sur laquelle le refrain à la Cornell de LEF et le sombre solo de Carmelo Pipitone font un malheur. J’en viens à « Dive In », cet ultime titre qui détonne par rapport aux huit morceaux précédents, déjà par sa longueur, lui qui accuse plus de quatorze minutes au compteur. Pat Mastelotto s‘éclate tout au long de sa très longue première partie, proposant un jeu percussif versatile tout en toucher. Si le propos se renforce à mi-course, l’ensemble demeure en deça de la puissance des riffs des plages précédentes. C’est plutôt la basse de Colin Edwin qui sonne la charge jusqu’aux deux tiers de « Dive In ». À partir de là, O.R.k. s’assagit considérablement pour une dernière partie entre acoustique et psychédélisme d’une douceur inattendue, un peu comme si le groupe n’avait pas souhaité prolonger infiniment l’excursion grunge. Après tout, pourquoi pas, surtout que j’aime les surprises et les formations qui ne se complaisent pas éternellement dans leur zone de confort.
Le bilan de cette écoute est extrêmement positif. O.R.k. a accentué sur Firehose Of Falsehoods son affinité avec le grunge en le combinant avec ses racines prog, ce qui lui confère une bonne dose de modernité. Un rééquilibrage psychédélique en fin d’album lui permet cependant de conserver une certaine inclassabilité revendiquée et de bon aloi.
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