Nick Magnus – N’Monix
Nick Magnus
Esoteric Antenna Records
Ancien claviériste de The Enid en 1976 puis de Steve Hackett entre 1978 et 1989 (soit de « Spectral Mornings » jusqu’à « Guitar Noir », en passant entre autres par « Defector », « Bay Of Kings » et « Genesis Revisited ») , Nick Magnus est un garçon assez déconcertant. Loin de la légende qui veut faire de lui un personnage timide et effacé, il possède tout au contraire une forte personnalité, pour le meilleur comme pour le pire. De « Straight On Still Morning » en 1994 à « Children Of Another God » en 2010, il a en effet mené sa carrière solo avec une régularité et un entêtement significatifs : choix contestables des chanteurs, arrangements loin d’être au top faute à des synthétiseurs écrasant les guitares et la rythmique de leur flot impétueux, fâcheuse tendance à produire des compositions si douces qu’elles en devenaient fades… Son nouvel opus échappe, comme par miracle, aux règles susdites grâce à une profonde remise en question et à la présence d’invités prestigieux.
Citons, en priorité, son ancien alter-ego Steve Hackett sur trois titres (avec une palme spéciale décernée au planant et symphonique « Shadowland ») mais également Rob Townsend (dont les magistrales parties de saxophone font décoller le divin « Broken » jusqu’aux cieux) et surtout Tim Bowness (au chant de rêve sur le décidément incontournable « Broken »). Sur cet album de la résurrection qui épilogue, avec pudeur et émotion, sur les thèmes conjugués de la vieillesse et de la perte de la mémoire, Nick Magnus démontre qu’il est bel et bien un pianiste racé et inimitable, doublé d’un compositeur de premier plan quand il veut bien s’en donner la peine.
Subtilité mélodique, complexité harmonique et ampleur des arrangements sont ici enfin au rendez-vous. Alléluia ! Le ton est, du reste, donné dès les premières notes de l’excellent morceau d’ouverture « Time », digne du meilleur Hackett. Par la suite, Nick s’extrait, en quasi permanence, du carcan couplet/refrain d’antan (on est loin du piteux « Hexameron ») pour nous offrir des envolées symphoniques de toute beauté (le diaphane « Memory », survolé par le timbre soprano de la belle Kate Faber, ou le cinématique « Kombat Kid », évoquant les fastes de Robert John Godfrey). Par ailleurs, les parties vocales, assurées la plupart du temps par un certain Tony Patterson, tiennent parfaitement la route (mieux vaut tard que jamais !).
Au delà de très sporadiques baisses d’influence (je pense au plutôt quelconque « Headcase »), « N’Monix » propose un rock progressif bon teint qui mérite plus que largement le détour.
Bertrand Pourcheron (8,5/10)
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