Nathan Mahl – Justify
Nathan Mahl
Unicorn Digital
Auteur d’une pléthore de disques, que ce soit en solo ou avec son groupe Nathan Mahl (nous en avons dénombré huit, depuis « Parallel Eccentricities » en 1983 jusqu’à « Exodus » en 2008), Guy LeBlanc est surtout connu du public progressif en raison de sa collaboration avec Camel. Tout commence au festival Nearfest en 1999 lorsque Andy Latimer découvre l’album « The Clever Use Of Shadows » que la formation canadienne a publié l’année précédente. Andy invite donc Guy pour le « Rajaz Tour 2000-2001 » en tant que claviériste et choriste. Le petit père LeBlanc devient vite membre à part entière du chameau et co-compose, sur « A Nod And A Wink » (2002), les trois morceaux suivants : le magnifique titre éponyme « A Nod And A Wink » et les bouleversants « For Today » et « After All The Years » (cette dernière pièce n’est hélas disponible que sur les pressages japonais et coréens du CD). Son épouse étant souffrante, il est remplacé par Tom Brislin (pour les dates américaines) et Ton Scherpenzeel (pour les dates européennes) lors du « A Nod And A Wink Tour 2003 » baptisé « The Farewell Tour ». Guy rejoint de nouveau la bande à Andy Latimer en mars 2013 pour une brillantissime relecture studio de « The Snow Goose » et il assure la tournée automnale de promotion de cet opus splendide. Malade à son tour (cancer du rein métastasé à la colonne vertébrale et donc, a priori, incurable), il est remplacé encore une fois par Ton Scherpenzeel pour l’extension de la tournée hivernale 2014.
Mu par une force intérieure peu commune, il décide alors de reformer, entre deux séances de chimiothérapie intensive, le groupe de ses premières amours. On ne retrouve que le bassiste Don Prince du line-up originel, les autres musiciens étant désormais Tristan Vaillancourt à la six cordes, David Campbell à la guitare et à la basse et, en tant que special guest, l’immense Andy Latimer auteur d’une performance éblouissante sur le titre « Infinite Light ». Guy trône bien entendu au sommet d’une armada impressionnante de synthétiseurs essentiellement analogiques et assure, sans fioriture excessive, les parties de batterie et le chant (ce dernier manquant hélas parfois quelque peu d’assurance).
Si les visages ont donc changé au fil des jours, le temps n’a par contre guère eu de prise sur l’identité musicale du groupe. Fidèle à ses idéaux de toujours, il a pondu en effet une nouvelle œuvre de qualité, conjuguant un profond attachement à certaines valeurs symphoniques « séculaires » avec la quête fervente de nouveaux espaces sonores. Cela donne naissance à quelques moments de bravoure d’une rare intensité. C’est ainsi que le splendide « It Tolls For Thee » adresse, toutes cymbales dehors, un savoureux clin d’œil à Camel (forcément…) tandis que le déjanté « Spirit » évoque les meilleures escapades solitaires de Tomas Bodin.
A portée de mesure de ce rock aux épanchements suaves et nostalgiques, Nathan Mahl nous délivre une petite poignée de pièces slalomant tout schuss entre jazz-metal (le furieux morceau d’ouverture « Tantrik Kobbler ») et fusion à la Brand X (les excellents « Deception » et « Justify »). Malgré quelques baisses d’inspiration de-ci de-là, le gang de Guy LeBlanc signe donc une œuvre de qualité, à déguster sans modération.
Bertrand Pourcheron (8/10)
Remerciements à Eric Salesse
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