Mystery – Lies And Butterflies
Unicorn Digital
2018
Rudzik
Mystery – Lies And Butterflies

Et revoila Mystery sur Clair et Obscur.
Cette chronique de Lies And Butterflies est publiée près de deux mois après la sortie officielle de l’album en Europe, soit le 14 juillet 2018 au festival Loreley lors duquel, dans des conditions techniques difficiles (avec un son indigne du groupe dont une guitare rythmique inexistante), Mystery a une fois de plus conquis un auditoire curieux de les découvrir. La raison en est que son indéfectible leader, Michel St Père, n’a pas souhaité démarrer la promotion de l’album avant sa sortie officielle par peur de le retrouver en torrent sur la toile du fait d’un chroniqueur indélicat ou négligent. Comme il l’a précisé en réponse à un fan qui s’interrogeait du peu d’échos dans la presse concernant cette sortie, « Dans le cas de Mystery, c’est les fans en premiers et après, les promos. ». Un peu dommage cette parano à l’heure où les labels se sont affranchis de ce problème avec l’usage des fichiers watermarked qui permettent d’identifier à coup sûr qui a commis l’infamie de bafouer le travail d’un artiste en s’empressant de le télécharger sur le net, faisant fi de l’effet de surprise pour le fan. J’ai donc dû renoncer à créer l’évènement en publiant la présente chronique pile le 14 juillet dernier. Ceci ne m’a pas empêché d’acquérir le précieux sésame (le CD) ce jour-là et c’est finalement à partir de cette galette que je suis en mesure de donner mon modeste avis.
Quand on revient aux affaires après deux albums monstrueux comme The World Is A Game et Delusion Rain, il est extrêmement difficile de ne pas décevoir son auditoire. Cela laisse deux possibilités au groupe : prendre des risques pour tenter de faire encore mieux ou jouer la sécurité en tirant sur les mêmes ficelles. Je dirais que Lies And Butterflies oscille entre ces deux choix, la première partie de l’album évoluant en territoire connu alors que la seconde partie propose du matériel légèrement plus innovant.

Lies And Butterflies étale de nouveau la capacité de Mystery à construire des mélodies classieuses et accrocheuses qui s’imprègnent très vite, malgré la longueur de certaines de ses pièces. On y retrouve cependant son péché mignon, à savoir des textes un tantinet convenus et parfois répétés abusivement comme le « Does anybody etc. » de la seconde partie de « Looking For Someone Else » mais on a connu pire dans le genre avec le lancinant « Have you seen their eyes etc. » de « The Willow Tree » dans Delusion Rain. Ce premier titre de l’album en deux parties épiques me laisse sur ma faim, la faute à certaines longueurs au chant et dans le riff de la première partie, à une construction sans surprises ainsi qu’à un finish très hâtif. Fort heureusement, les soli lumineux de Michel parviennent à le maintenir quand-même à flot.
« Comme To Me » rappelant très sensiblement « The Last Glass Of Wine » mais en plus varié, donne un peu de peps bienvenu à ce début d’album avec une légère mais judicieuse accélération du rythme.
La magnifique ballade « How Do You Feel ? », sorte de porte-drapeau du savoir-faire du groupe et de son guitariste pour susciter des émotions, est un titre, plus direct et compact qui pourrait permettre à Mystery d’accéder aux ondes des radios mainstream comme certains de leurs fans le souhaiteraient.
Si jusque là, le choix de la track list est correct avec, cependant, des morceaux sans grandes surprises, l’enchaînement avec une seconde ballade d’affilée semble moins heureux. Mais le passage instrumental à la flûte puis à la guitare sur une rythmique de piano soutenu par un jeu de batterie rutilant donne une seconde vie jouissive et inattendue à un « Something To Believe » plus emballant dans sa partie instrumentale que dans celles chantées.

C’est cependant dans « Dare To Dream » et surtout « Where Dreams Come Alive » que l’on trouve un peu plus d’originalité dans les mélodies et dans la rythmique en particulier avec le batteur Jean-Sébastien Goyette qui, par la richesse de son jeu, contrebalance efficacement des rythmes plutôt lents. Dans le second, on notera aussi la basse slappée de François Fournier qui procure un max de groove et un final, pour le coup, très réussi.
Avec l’épique, « Chrysalis », on tutoie les références de Mystery en la matière à savoir « Another Day » et « A Song For You ».
Si le doute était encore dans la tête de certains (pas dans la mienne), Jean Pageau surclasse tous ses prédécesseurs au chant, lui qui est également un excellent frontman et pousse l’éclectisme jusqu’à recourir régulièrement à la flûte et aux claviers pour étoffer sa performance. Après tout, peut-être est-ce lui le papillon issu de la chrysalide qui butine le pollen de Mystery pour leur plus grand bonheur réciproque ? Sa voix illumine ce « Chrysalis » soutenu par un riff sec et agressif (enfin… pour Mystery) qui apporte une superbe conclusion comme le groupe s’attache souvent à le faire dans ses albums.
Ainsi, Lies And Butterflies séduira les fans du groupe et pourquoi pas les nouveaux entrants potentiels cependant, il me semble un peu trop s’appuyer, surtout dans sa première partie, sur son passé récent.
La volonté de son mentor est certainement de rester dans la zone de sécurité du concept musical de Mystery. Pourtant, le fait d’avoir un line up enfin stabilisé et la confiance que cela apporte, pourraient le conduire à prendre opportunément plus de risques et à innover un peu plus sous peine de tourner relativement en rond comme IQ ou John Mitchell dans ses divers projets.
https://www.therealmystery.com/
https://www.facebook.com/groups/mysterysound/
Bonjour,
Merci Rudzik pour la critique nuancée et précise de cet album. J’aimais aussi les premiers CD de Mystery dont Desillusion rain et j’ai d’ailleurs été les voir plusieurs fois au Spirit of 66 de Verviers (je suis belge mais cela ne s’entend pas ici :)). Entre parenthèse, chouette salle de 300 personnes max. avec bar ouvert. Programmation éclectique dont du prog : Arena, Pendragon, Gazpacho, Mostly autumn, I.Q., etc. C’est comme ça que j’ai pu renouer avec une musique et des groupes que j’avais choisis en tant qu’ ado : Génésis, Yes, Pink Floyd, Barclay James Harvest, Deep Purple, etc. Et un peu plus tard, Marillion et aussi les petits belges de Machiavel.
Les albums de Mystery me plaisaient donc bien tout comme l’autre projet de Michel Saint Pierre : Huis.
Par contre, je trouve que maintenant c’est un peu trop répétitif, long et souvent ennuyeux. J’espère que le prochain album sera plus audacieux avec des formats plus courts (6-7′ max.). Un autre chroniqueur évoquait cette question de la longueur avec le nouvel « album de reprises » d’I.Q. et ce qu’il écrit m’a semblé bien vu.
Je poursuis la découverte de votre site et vous remercie pour vos avis.
Xavier
Merci de nous lire et pour cet avis éclairé. Quand j’ai publiée cette chronique, je m’attendais à me faire descendre par la fan base canadienne de Mystery et, étonnamment, ceux qui réagirent furent plutôt de mon avis donc lucides, cet album comportant des longueurs et des plans déjà entendus. J’ai le même background musical que toi, par contre, j’aime bien les longues pièces, seulement si elles sont suffisamment versatiles pour ne pas engendrer la lassitude. Mon ami Fred a tendance à les détester, d’où son intérêt pour l’album d’IQ « condensé ».
Musicalement Rudzik
Merci Xavier pour ton commentaire ! Pour préciser le propos de Palabras, je ne « déteste » pas les longues pièces ! Elles m’ennuient si elles n’ont pas d’intérêt à être longues. Il faut que cela serve le propos. Tant de groupe de rock progressif ont tendance à étirer leurs morceaux parce que c’est ce qui se fait en prog. Le découpage qu’IQ a opéré montre bien qu’une bonne chanson peut tenir sur moins de quatre minutes, même si, à d’autres endroits, cela peut être frustrant car on sent bien que le morceau n’est pas fini. Bienvenue Xavier et bonne continuation de découvertes 🙂