Morrighans – The Three Circles Of Death

The Three Circles Of Death
Morrighans
Autoproduction
2016

Morrighans - The Three Circles Of Death

En chroniquant récemment Catchlight, je faisais remarquer toutes les difficultés qu’il y avait à accoucher d’un album conceptuel (d’autant plus lorsqu’il s’agit du premier effort d’un groupe). Les Lyonnais m’avaient carrément épaté. Pour Morrighans, je suis plus mitigé, mais peut-être suis-je devenu trop exigeant après avoir capturé la lumière ?

Morrighans - Band

Il doit y avoir de cela car The Three Circles Of Death est loin d’être un mauvais album. Mais il souffre de péchés que je qualifierais de jeunesse. J’y reviendrai plus après dans cette chronique, en m’efforçant de faire la part des choses.

Au chapitre des côtés positifs, il faut souligner l’artwork très réussi de la jaquette. Il est l’œuvre de Fanny Thibert, et se trouve très inspiré, comme l’album du reste, par le courant steampunk. C’est étrange, mais ce dessin m’a rappelé l’univers heroic/fantasy d’un ancien jeu vidéo d’aventure/recherche dans lequel je m’étais immergé corps et âme il y a une quinzaine d’années, j’ai nommé Arcanum. La vidéo d’intro vous faisait vivre le crash d’un zeppelin dont vous étiez l’unique rescapé, mais je m’égare…

Le dirigeable entouré de corneilles menaçantes fait référence à la divinité celte Morrighan, dont la légende post-apocalyptique la présente comme étant une sorte de vautour divin emportant les morts tombés au champ d’honneur. Le concept de l’album exploite cette fable, en particulier, en s’attachant à décrire les émotions que suscitent les évènements douloureux de la vie et surtout de la mort. Ce sont surtout les textes du titre éponyme (œuvre de l’auteur lyonnais Nicolas Le Breton) qui font directement référence à la divinité morbide. Ils nous renseignent sur ce que sont les trois cercles de la mort, à savoir les remords sur ce qu’on n’a pas pu accomplir de notre vivant, la peur de l’inconnu qui nous ronge et le désespoir de savoir que tout s’arrêtera un jour.

Malheureusement, à vouloir certainement trop coller au concept morbide et mélancolique de l’album, les titres s’enchaînent avec une certaine linéarité du point de vue du rythme et de l’ambiance. Le mix trop compressé, le jeu de batterie assez simpliste (« Three Circles Of Death ») et le chant un peu trop omniprésent contribuent probablement à cette linéarité. De plus, le mastering ne fait pas ressortir avec beaucoup de clarté les différents instruments. C’est dommage car les harmonies sont souvent de toute beauté. Il enrobe aussi le chant d’un peu trop de reverb.

Justement, en ce qui concerne le chant, Fanny assure très bien dans un registre lyrique ou en matière d’harmonies vocales mais semble être moins à l’aise quand il s’agit de poser sa voix sur des tons plus graves (« Intra Nox Insomnia », « Schizophrenia »). Son accent français est gênant sur des textes anglophones largement majoritaires. C’est ici que le groupe, semble-t-il, est tombé dans un des pièges de l’album conceptuel, à savoir la surcharge de lyrics.

Morrighans - Band

Remarquez, même les plus grands comme Ayreon ou Avantasia se complaisent régulièrement dans ce genre de trappe grandiloquente. C’est pourquoi, j’ai toujours du mal à écouter complètement un CD de ces groupes. J’aurais donc aimé qu’une plus large place soit donnée aux instruments et à quelques soli sur ce disque. Par exemple, « Mourning Song » est très aérien et lance joliment l’album, mais il me laisse sur ma faim lorsqu’enfin un petit solo de gratte sympa démarre … uniquement pour achever hâtivement le morceau.

J’ai l’impression de m’attarder sur le négatif, alors il est temps d’en revenir aux satisfactions. Le ton se fait plus métallique sur « Schizophrenia », au clip très original collant parfaitement aux textes et qui est très réussi. C’est aussi le cas sur l’excellent « The Reaper’s Hand », dont le riff réveille vigoureusement l’auditeur en alternance avec quelques ritournelles de piano qui le contrebalancent opportunément.

Le morceau de choix de cet album est à mon sens « The Road », un titre à tiroirs qui flirte avec les huit minutes. Son intro au piano, ses arpèges de gratte non saturée en rythmique alternée avec un riff plombé accéléré et puissant lui donnent beaucoup de caractère. Il s’agit du titre le plus ambitieux du combo, un exemple à suivre à mon sens pour de futures compositions. De même, « Angel Song » est exécuté sur une cadence de valse lente plutôt sympathique qui met bien en évidence la capacité du groupe à proposer des rythmiques lumineuses. Puis l’enchaînement de deux titres pratiquement joués sur le même rythme lent, à savoir « The Awakening » et « The Dark Tides », fait retomber l’album dans une certaine langueur qui m’a presque fait passer à côté des superbes harmonies vocales du titre éponyme sur lesquelles Fanny excelle. On a même droit sur ce morceau à un petit solo de guitare gorgé d’émotion qui s’incruste assez facilement dans le crâne. Les touches d’orgue Hammond sur « The Awakening » et « Travel With Spirit », ainsi que le jeu de basse plus ondoyant sur ce dernier, montrent également que Morrighans possède bien le potentiel pour étoffer sa production future.

Il est temps de conclure cette chronique qui traite d’un album prometteur mais comportant aussi un certain nombre de défauts ; à relativiser, cependant, du fait qu’il s’agit du premier album de nos amis « péageois ». Eh oui, les cinq compères de Morrighans sont également les organisateurs du sympathique festival « Le Péage Du Rock » au Péage-de-Roussillon (38). Outre l’organisation de la prochaine édition, il leur faudra aussi travailler leurs prochaines compositions pour tenter de donner un peu plus de caractère, d’équilibre et d’ambition instrumentale à un futur album, car ils en ont assurément les capacités.

Rudy Zotche

http://morrighansmusic.wixsite.com/morrighans

https://www.facebook.com/Laurentmorrighans/

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