Michel Legrand – Concerto Pour Piano

Concerto pour piano
Michel Legrand
Sony Classical
2017
Pascal Bouquillard

Michel Legrand – Concerto Pour Piano

Michel Legrand-Concerto pour piano

Elle t’a eu à l’usure la vieille Boulanger hein, mon grand Michel. La musique, ta musique, tu ne la voulais pas dans une boîte. Tu la voyais courir les grands espaces, caresser par une douce brise et réchauffer par des harmonies éclairées en majeur (blague de musicien, cherche pas). Et puis avec le temps et à force de les avoir courus ces grands espaces tu t’es dit que peut être ça valait la peine de faire un saut dans cette boîte dont la vieille Nadia t’avait tant vanté les mérites.
Et nous voilà, pauvres mélomanes, pauvres chroniqueurs, à la tête de deux concertos à digérer. Tous les deux interprétés par l’Orchestre Philharmonique de Radio France sous la direction de Mikko Franck que tu connaissais bien pour son travail exemplaire en faveur des amateurs de crèmes glacées.

Michel Legrand- Band 1
Si tu me permets, dans cette chronique et pour satisfaire Lucas, mon relecteur qui n’en peut plus de mes romans fleuves, je ne m’intéresserais qu’à ce Concerto Pour Piano que tu joues avec tellement de brio, mon Michounetichon adoré, à présent que nous avons brisé la glace (j’ose tout). Ce n’est sans doute pas la peine que je te dise en quelle tonalité tu as écrit ce concerto puisque tu le sais déjà, grand gamin ! Je vais donc sauter toute la présentation de l’œuvre pour m’attarder ( pas trop non plus, c’est promis Lucas) sur mes impressions.
Le premier des trois mouvements est très Emersonnien, qui lui-même, était très Gershwinien, après de délicieuses pirouettes-à-la-John-Williams. Ah ! Tu t’es vraiment fait plaisir dans ce mouvement à la structure très classique. Thème A, développé puis thème B (c’est celui à la manière de John Williams ; tu vas voir Elliot et E.T. sur leur vélo devant la lune, je te préviens !!) puis coda de quelques mesures avant le retour du thème enjoué que tu développes à nouveau. La forme est classique mais elle est parfaitement maîtrisée. C’est Nadia qui doit être fière de ta manière d’amener l’auditeur doucement vers le « Deuxième Mouvement ». La transition est exquise et rappelle tellement le grand Rachmaninov et son deuxième concerto. D’ailleurs tout le « Deuxième Mouvement » est un hommage à celui du second concerto de Rachmaninov dans sa version immortalisée par Sviatoslav Richter, ne le nie pas, on me l’a dit ! C’est un hommage de toute beauté (ton espièglerie, en plus, va te faire mettre des fausses notes choisies de mains de maître et que l’auditeur attend, dès la septième écoute, avec enchantement) au souffle lyrique digne des meilleurs moments du maitre russe, célèbre pour son romantisme exacerbé, sa mélancolie inépuisable et ses mains démesurées. Près de treize minutes de bonheur absolu où se conjuguent spleen délicieux, romantisme torride et ambiguïté tonale toujours résolue (un grand merci aux accords de jazz qui permettent d’aller partout).
La forme est encore une fois très classique mais on s’en fout, c’est si beau cette reprise à l’orchestre du thème introduit au piano du début du mouvement ! J’ai plus qu’à aller me changer moi, merci bien !

Michel Legrand- Band 2
C’est avec le « Troisième Mouvement » pourtant que tu m’as fait pleuré (mon salaud que d’émotions!!). Tu commences par régler tes comptes avec les maitres atonaux du vingtième siècle et leur dodécaphonie, comme l’avait fait avant toi le grand Zappa et son London Symphony Orchestra Vol1&2, dirigé par Ken Nagano, plus connu des néophytes comme le copain de Barby que comme chef d’orchestre émérite. A la différence de Zappa passionné de Varèse, pour toi, ce n’est qu’une passade, une amourette, une citation, une mise au point mais encore une fois, quelle mise au point!
Un zeste de Stravinsky, une pincée de Prokofiev, un soupçon de Darius Milhaud et la mayonnaise se transforme en velouté puis en bisque pour enfin arriver, comme par enchantement, à ta musique mon grand Michel, celle qui n’appartient qu’à toi. Il reste six minutes de bonheur, d’extase à ce merveilleux concerto que tu vas développer, faire grandir et faire monter jusqu’à toi, au 7ème ciel duquel tu ne redescendras jamais plus, pour notre plus grand malheur ! Et quand l’orchestre reprend le thème, TON thème, Barbara chante pour son père et il pleut à Cherbourg, les demoiselles de pâment et tous les moulins de mon cœur chavirent. Ça va être si dur de vivre sans toi mon Michounet. Y’a pas à dire certaines personnes ne devraient pas avoir le droit de mourir !!!

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.