Marcus Viana- Trilhas & Temas
Marcus Viana
Sonhos & Sons
Non content d’avoir édifié pierre après pierre, au cours des eighties et des nineties, une œuvre grandissime sous l’égide de Sagrado, cet artiste de premier plan, tout à la fois technicien accompli, rompu à toutes les subtilités architecturales, et stakhanoviste acharné, s’est illustré par la publication de la sublime tétralogie « Trilhas & Temas », entre 1992 et 1999. Le premier volet de cette œuvre d’envergure a fait figure de franche réussite et confirmé l’idée qu’il existait bel et bien une ligne de démarcation dans la production du Maître, entre ses escapades en solitaire et ses réalisations « sagradiennes ». Une première différence se retrouvait de manière évidente au niveau des textes et des sujets abordés. Avec Sagrado, Marcus Viana semblait s’adonner à la quête quasi « rilkéenne » d’une Vérité métaphysique tout à la fois intime et universelle, à travers l’exploration et le développement des thèmes de l’Homme et du Cosmos. A cette universalité philosophique, souvent teintée d’effluves panthéistes prononcées (l’incontournable « The Central Sun Of The Universe » sur l’album « Farol Da Liberdade »), s’opposaient les problématiques plus « prosaïques » développées au fil de ses œuvres solo.
« Trilhas & Temas – Volume 1 » illustrait ainsi le sentiment d’émerveillement d’un père voyant avec bonheur et sérénité grandir son enfant (la petite Olivia, âgée alors de huit ans, interprète d’un « Ave Maria » frissonnant). A cette division thématique répondait tout naturellement une seconde dichotomie, d’ordre musical cette fois-ci. Dans le cadre de Sagrado, Marcus Viana offrait une synthèse épanouie de son immense culture artistique. Une grande exigence dans le travail de composition, directement héritée du mouvement classique, s’y conjuguait alors avec une spontanéité et une fougue typiquement rock. En solitaire, et c’est particulièrement perceptible sur cet opus, cette énergie avait tendance à s’estomper voire à s’effacer, la batterie étant absente. La tendance était alors aux thèmes aériens tendrement volubiles, tout en caresses, en frissons subtils et en mystérieuses correspondances qui résonnaient d’une palpitation secrète clairement perceptible sur les passages les plus sereins.
Ces délicates harmonies, baignant dans une douce tiédeur humaine, étaient bâties autour des nappes évanescentes des synthétiseurs et des arabesques subtiles de la flûte, mises au service d’un violon qui, s’il s’avérait formidablement virtuose, n’imposait jamais pour autant sa pensée tyrannique à l’élan créateur. C’est que la musique de « Trilhas & Temas – Volume 1 » se voulait pure émotion, porteuse d’un lumineux message chargé de « cette espérance et de cet amour qui peuvent seuls nous rendre à nous-mêmes » (Albert Camus). Formidable album pour un formidable artiste !!!
Bertrand Pourcheron (9/10)
http://www.marcusviana.com.br/