Kerrs Pink – Mystic Spirit
Kerrs Pink
KPP Records
La dernière trace discographique de cet excellent groupe norvégien de rock progressif à tendance folk remontait à 2002, avec la sortie de « Tidings ». Et puis, silence radio total jusqu’à aujourd’hui. Qu’en était-il advenu ? Mystère. Mais voilà, onze ans après, la bande du guitariste Harald Lytomt ressurgit sans crier gare et nous balance dans les gencives un magnum opus (son sixième album depuis ses débuts en 1980) intitulé « Mystic Spirit ». L’heure semble y être au retour aux sources d’un progressif flamboyant, comme aux plus belles heures de « Mellom Oss » (1981) ou de « A Journey On The Inside » (1993). Et, en effet, la formation, désormais rejointe par le très doué chanteur de Magic Pie, Eirikur Hauksson, nous offre un mélange somptueux de folklore scandinave (sans aucun instrument acoustique « traditionnel », accordéon mis à part) et de rock symphonique principalement inspiré par Camel, Genesis et Pink Floyd. Les amateurs de ces trois groupes référentiels se retrouveront sans peine dans ce disque de toute beauté, débordant d’envolées lyriques à la six-cordes (jetez-donc une oreille attentive au magnifique titre d’ouverture « Final Curtain »), de mélodies pures comme de l’eau de source (les bouleversants « Until I Know » et « The Last Journey », sur lesquels plane l’ombre du grand Andy Latimer) et de constructions harmoniques complexes (l’audacieux « Creepy You Crawl »). On a donc droit à douze compositions aux durées plutôt modestes (le passionnant « Earth To Earth » mis à part), particulièrement bien troussées et faisant preuve d’un sens mélodique affuté au cordeau (« Mysterious Wood », « Creepy You Crawl »). Se caractérisant par la prédominance de la guitare et des claviers vintage (Hammond C3, Minimoog, Mellotron), la musique de Keers Pink pioche par ailleurs allègrement dans ses racines norvégiennes, à grand renfort de flûte, de tuba (aux sonorités samplées), de timpani et d’accordéon, le tout rythmé par une batterie volubile et une basse bien grondante. Bref, on aurait presque ici affaire à une sorte d’Änglagård en moins torturé et alambiqué, mais empli d’un même imaginaire aux parfums de légendes nordiques. Un sacré retour en force !
Philippe Vallin & Bertrand Pourcheron (8/10)