John Trudell – Blue Indians

Blue Indians
John Trudell
1999
Fargo records
John Trudell – Blue Indians
Il est des disques tellement forts qu’on ne saurait en taire l’existence. « Blue Indians » de John Trudell est de ceux-ci . Mais avant de parler de l’œuvre elle même, qui est donc son auteur, ce fameux John Trudell que tout le monde ne connaît peut être pas encore ? Faisons donc les présentations : l’homme est à la fois poète, chanteur et militant pour les droits des indiens d’Amérique dont il est encore à ce jour l’un des porte parole les plus actifs. Et John Trudell est pleinement concerné par la cause qu’il défend, lui même étant indien Dakota Santee (dans le langage commun, il fait donc partie de la grande nation des sioux, nom péjoratif inventé par les blancs suite à leur rencontre avec ces fameux « diables rouges » des plaines, et qui a engendré l’histoire sinistre que l’on sait).Ce roi du talking blues (vous comprendrez un peu plus bas de quoi je parle !), dont Bob Dylan a dit un jour que « Lou Reed lui même n’arrivait pas à la cheville », en est venu à s’exprimer à travers la musique suite à des événements personnels on ne peut plus tragiques. En effet, un jour de février 1979, Trudell participe à une marche à Washington, à l’initiative de l’American Indian Movement (AIM), et brûle un drapeau américain devant le siège du FBI. Les représailles à cet acte « terroriste » ne se font pas attendre : quelques heures plus tard, dans la réserve des Shoshones paiutes où Trudell a élu domicile avec sa famille, sa maison est ravagée par un incendie criminel où périront brûlés vifs sa femme, sa belle mère, ainsi que ses trois jeunes enfants. Trudell survivra à ce cauchemar en exorcisant sa douleur et sa colère au travers ses vers et sa musique.Il publiera depuis une dizaine d’albums dont 5 seulement sont distribués en France, les excellents « Aka Graffiti Man », « Johnny Damas & Me », « Bone Days » et « Live At FIP ». Si ses deux prédécesseurs revendiquaient une étiquette et une approche très rock (on se souvient du puissant et contestataire « Bombs Over Bagdad », écrit en pleine guerre du golfe), « Blue Indians », beaucoup plus calme dans la forme, lorgne davantage vers la fusion du blues et de la musique traditionnelle du peuple lakota (influence déjà très présente sur les précédents opus). Produit par son vieux complice Jackson Browne, « Blue Indians » délivre son discours empli d’émotion à l’état brut au travers 12 titres de pure poésie, beaux, inspirés et engagés, tous plus magnifiques les uns que les autres. John Trudell n’y chante pas ses mots comme à son habitude, il les dit de sa voix chaude, juste et profonde, au travers une narration qui se détache des accords blues-rock qui l’accompagnent, une musique envoûtante, délivrée par un merveilleux ensemble de slide, guitares électriques et acoustiques, percussions et chants incantatoires du peuple indien (Ah ! les douces complaintes du géant Quiltman, l’ombre de Trudell depuis bien des années maintenant, à la scène comme en studio…). L’émotion est à son point culminant à la fin de l’album quand Trudell dédie ses dernier mots à sa femme défunte Tina (« The Only One For Me » et « You Were »), sur fond de texture blues planante, presque onirique. Les larmes ne se retiennent pas, on touche au sublime, à l’absolu. »Blue Indians » est à l’image de son auteur : authentique et bouleversant. Un hymne véritable à ce qu’il y a de plus humain en nous. John à dit un jour : « Ces lignes sont mes bombes, mes pleurs, ma vie ». Et ses quelques mots sont inscrits comme le témoignage d’un homme qui à l’image de son peuple ne capitulera jamais, malgré ses souffrances, se blessures, son âme meurtrie. Il est des disques tellement forts qu’on ne saurait en taire l’existence
Philippe Vallin (9/10)
 
Pour ceux qui voudraient en savoir plus sur l’œuvre de John Trudell, retrouvez ses textes (période 1983/94) dans son livre « Indigo rouge » aux éditions « Encres et plumes » (2000).Site web : http://www.johntrudell.com/
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Un commentaire

  • BRUS

    Trudell, un poète écorché vif, qui dénonce le sort réservé aux indiens, aux minorités, aux femmes. Une musique atypique, mélange de rock, de blues, de mélopées indiennes (chapeau Quiltman) qui
    vous prend au ventre, au coeur. Trudell, ou l’appel au réveil des consciences et à plus d’humanité. J’ai eu la chance d’assister à son concert du 22 avril 1995 à Grenoble. Impossible à décrire.
    Tout simplement magique. De conscience à conscience.

    Nouvel album « Crazier Than Hell » depuis le 8 septembre 2010 (indisponible en France pour le moment ??? …)

    Vidéos sur youtube de quelques chansons (out of the blues, peace, sweeting the light, … ) mais aussi divers enregistrements sur les thèmes qui lui sont chers.

    site myspace : http://www.myspace.com/johntrudell 

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