Isbjörg – Iridescent
Autoproduction
2019
Rudzik
Isbjörg – Iridescent
Les sirènes de Copenhague (et non les six reines même s’ils sont effectivement au nombre de six) m’ont glissé à l’oreille ceci: « Les originaux Danois d’Isbjörg ont enfin donné le jour à leur premier LP fort justement nommé Iridescent ». Aussitôt, flash back sur In Endings que j’avais chroniqué à mes débuts chez C&O, ce titre/EP que l’on pourrait justement qualifier d’« iridescent », composé de courtes plages musicales que l’on pouvait écouter de façon complètement aléatoire pour en avoir une version totalement différente à chaque fois. Très original.
Mine de rien, Isbjörg ne serait-il pas en train de devenir mon « chouchou » car il détient le record du nombre de chroniques que j’ai écrites pour un même groupe, à savoir quatre. En effet, si vous êtes curieux, vous pourrez vous amuser à relire ma prose sur Isbjörg, In Endings et Glacier et d’ailleurs je l’ai fait également, histoire de me remettre tout ça en tête. Force est de constater que je suis un vrai devin hé hé ! En effet, à l’écoute d’Iridescent, ma première impression a été qu’Isbjörg avait tout spécialement travaillé sur les péchés de jeunesse que j’avais identifiés dans mes trois chroniques précédentes pour sortir un premier LP qui est, disons le de suite, remarquablement réussi. Putain ! Comment je me la pète moi ! Bon plus modestement, je pense qu’ils n’ont pas forcément eu besoin de mes écrits pour identifier leurs axes d’amélioration mais ils ont indubitablement sérieusement progressé tous azimuts.
Changement de chanteur, amélioration du mix tout en conservant l’originalité de la construction musicale autour du piano (mais celui-ci n’est plus trop mixé en avant), enchaînements plus convaincants, bref, rien que du mieux ! De plus, on y retrouve parfois des touches popisantes en particulier sur les refrains, un peu à la façon d’A.C.T. Et tout ça, on le constate dès le premier morceau, « Supine » qui donne tout de suite la banane. Un petit intermède de piano, comme un passage obligé, vu l’importance donné à cet instrument, puis c’est le destabilisant « Illuvea » qui surgit, astucieusement construit sur une rythmique binaire de grosse caisse décalée par rapport aux arpèges de piano et à la trame principale du titre. Il s’agit d’un manifeste pour l’environnement, un de plus me direz-vous ? Personnellement, je pense qu’il n’y en aura jamais trop devant l’entêtement et la surdité de la race humaine vis à vis de la dégradation de notre chère planète grise oups, bleue paraît-il. A noter que la remarquable jaquette de l’artiste Freia Maria Faber illustre parfaitement ce thème alors que la production « faite maison » a elle aussi gravi une sacrée marche.
Je parlais du changement de chanteur et, effectivement, j’avais noté une certaine platitude chez leur ancien vocaliste. Celui-ci ayant déclaré forfait par manque de disponibilité, Niklas Jespersen (Lightbulb Son) l’a remplacé avec bonheur car il a la versatilité vocale nécessaire et suffisante pour donner une autre dimension aux compos d’Isbjörg. Il possède aussi cette réserve de puissance qui s’exprime lorsqu’il hausse le ton le temps d’un « Petrichor ». Petite anecdote, Niklas a intégré le combo il y a seulement six mois alors que les compositions étaient déjà finalisées instrumentalement. Il a donc dû relever a posteriori le challenge d’écrire les textes et de poser sa voix sur une production musicale à laquelle il n’avait pas contribué. A noter aussi l’arrivée de Mathias Schouv Kjeldsen à la basse alors que les quatre autres membres du groupe sont restés fidèles au poste. La section rythmique a solidement progressé comme pour cette démonstration de Frederik Ølund Uglebjerg aux fûts sur « Needles » avec son refrain très accrocheur.
Pour le reste, comme déjà dit, le piano de Mathias Bro Jørgensen demeure la pièce centrale de l’édifice mélodique construit par Isbjörg, témoin un emballant « While The Sunlight Grace The Mourning » oscillant entre rythmes funky, jazzy ou carrément metal. Il se décline à la Frost* sur « Stockholm Reversed » dont la montée en puissance est sans faille, comme la reprise incandescente de riff prélude à une joute de guitares homérique entre Dines Dahl Karlsen et Lasse Gitz Thingholm. On le voit, il n’y a rien à jeter dans ce fabuleux opus et ça n’est pas la dernière plage, la plus progressive de l’album, qui fera retomber le soufflet, bien au contraire. « Dimmie » et ses allers et retours remarquablement équilibrés entre les guitares et le piano démontre qu’Isbjörg a désormais atteint sa vitesse de croisière. Le petit monde du prog va devoir sérieusement compter avec lui car, en fait de soufflet, je dirais que notre sextet de jeunes pousses danoises réussit à « souffler » un vent musical de fraîcheur Iridescent sur un genre nombriliste duquel il est souvent difficile de s’extraire et de marquer ses différences et son originalité.
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