Hommage à Hermeto Pascoal (1936-2025)
Lucas Biela
Hommage à Hermeto Pascoal (1936-2025)
Avec des artistes et groupes comme Mystifier, André Matos, Sepultura, Ratos de Porão, Milton Nascimento, Naná Vasconcelos, Amon Tobin, Tim Bernardes, Egberto Gismonti ou encore Heitor Villa-Lobos, la scène musicale brésilienne est à l’image de sa population : très diversifiée. Il en est néanmoins un qui ne s’entiche guère des conventions, Hermeto Pascoal. Ce dernier définit d’ailleurs sa production comme « música universal » (d’après ses propres termes, il s’agirait d’une musique « qui vient de l’univers […], d’ une énergie qui ne s’arrête jamais et qui plane au-dessus de nous, où que nous soyons »). Ayant grandi dans une « commune« qui ne disposait pas de l’électricité courante, le parcours de notre musicien est exemplaire. Initié très tôt à l’accordéon, il a vite montré un intérêt particulier pour les instruments de musique de manière générale, allant même jusqu’à utiliser des ustensiles de la vie de tous les jours, parfois dans la nature même. Cet ancrage à notre quotidien et son attachement à l’environnement rendent sa musique aussi bien attachante qu’originale.
Même si la vision de notre compositeur est associée à l’avant-garde, la rencontre de la musique classique, des rythmes brésiliens et du jazz avec ses schémas harmoniques et mélodiques bien balisés l’inscrivent dans le cycle de développement des musiques savantes. Ce n’est cependant qu’après une décennie à jouer avec de futurs grands noms de la scène brésilienne comme Airto Moreira ou Edu Lobo que notre « sorcier » s’est émancipé. Il faut en effet attendre sa collaboration avec Miles Davis pour que sa carrière prenne définitivement son envol, occupant dès lors le firmament brésilien pendant plus de cinquante ans. Et bien que dévoué à la production de nombreux artistes, ses recherches musicales ont porté leurs fruits de manière régulière. L’exubérance, l’explosion de couleurs (toujours cette nature en filigrane) se retrouvait cependant parfois bousculée par un humour que n’aurait pas renié Frank Zappa (voir le lien vidéo plus bas) et auquel son fidèle compagnon Itiberê Zwarg (voir la chronique de son dernier album ici) n’était pas étranger. Le « sorcier » ne sera plus là pour jongler avec toutes les notes qui se précipitaient aux portes de son imagination débordante, mais son héritage musical continuera à faire travailler la nôtre.