Foretaste – Terrorist TV
BOREDOMproduct
2008
Foretaste – Terrorist TV
XX (dans la vraie vie Sylvie) et XY (vous pouvez aussi l’appeler Pierre) composent Foretaste, qui est un groupe parisien d’électro-pop bien connu des Lyonnais et signé sur l’excellent label marseillais BOREDOMproduct. Ceux et celles qui me suivent régulièrement dans mes chroniques doivent savoir à quel point j’ai un plaisir tout particulier à écouter les albums de Forestaste que je reçois, à les chroniquer et à les réécouter encore souvent ensuite. Je vous ai déjà parlé de Beautiful Creature, ah, rien que le titre, j’en salive encore, de Love et de Live On Demand, tout un concept pour un duo d’opus d’une étourdissante perfection, et de leur magnifique dernier album, Space Echoes, qui est en vérité un sommet. Mais je n’avais encore dit mot de Terrorist TV. Je l’ai déjà dit, Pierre et Sylvie possèdent cette rare capacité à être aussi touchants dans certains de leurs titres que vigoureux dans d’autres, les aspects émotionnel et énergique se mélangeant aussi dans d’autres titres selon des alchimies variées. C’est ce côté de profonde humanité qui nous frappe d’abord, portée par la voix chaude et tendre de Sylvie, juste avant que nous ne nous rendions compte du boulot incroyable de Pierre derrière ses synthés et que l’envie nous prenne de nous déhancher sur ses rythmes. Mais que penser d’un album de leur facture intitulé Terrorist TV ?
On pourrait sans attendre creuser mentalement l’idée d’une TV addictive, souvent bas de gamme et chronophage. Le procès de cette TV-là n’est plus à faire même s’il reste toujours à refaire tant il y a de matière dans cette affaire. Encore que la TV ait eu et aura encore ses nombreuses heures de gloire. Mais revenons à Foretaste et à son album, est-ce bien là le fond de leur propos ? On ne sait pas trop. Peu importe en fait. Car quand déboule « Dying For The First Time In My Life », le premier titre de l’album, on n’en est déjà plus là. On se tait, on écoute, on savoure. Elle dans la lumière, lui dans l’ombre, Yin et Yang exceptionnel et fascinant de la musique électronique. Sa voix subtile et profonde captive comme celle d’une vamp du Berlin des années 20. Discret, il s’occupe à tirer le meilleur de ses machines. Foretaste n’est pas un groupe, c’est une évidence. Et quand vient le deuxième titre, « The Prototype Of Love », ce duo qui coule de source continue de nous envoûter par le dessin un brin suave de ses mélodies et par la précision délicieusement raffinée de ses rythmes. C’est réellement de la sublime ouvrage électronique. Et à ce propos, Pierre avoue : « Nos maîtres sont nombreux, mais on peut citer par exemple Anne Clark, Depeche Mode, Bowie, Klaus Nomi et Kraftwerk. » Heureux les maîtres qui ont de tels élèves.
Malgré leur habillage intensément synthétique, les chansons de Foretaste s’intéressent avant tout aux hommes, aux femmes, à leurs souffrances, à leurs pensées intimes, à leurs espoirs souvent déçus et à leurs amours compliquées et finalement si tristes, avec un penchant assumé pour la noirceur. Sylvie l’exprime ainsi : « Nos chansons traduisent les états d’esprit par lesquels peuvent passer les gens à différents moments de la journée et nous avons développé le côté le plus sombre, le côté nocturne. » Et Pierre d’ajouter : « Nous parlons aussi de choses très simples qui nous compliquent la vie : l’amour la haine, la mort, les sentiments humains… » Et la TV dans tout ça ? On ne sait pas, on ne sait plus. En revanche, impossible de ne pas frissonner quand Sylvie chante, sa voix portée par des nappes de Mellotron : « Where is your love guy? Target is closed to be identified. What happens to you boy? Civilians are praying for your compassion. » Prémonitoire quand on pense au Bataclan, où Foretaste a d’ailleurs joué le 20 septembre 2008. Y avaient-ils chanté cette chanson, dont le titre est « No Remorse » ?
Frédéric Gerchambeau
Ils sont forts chez clair et obscur d avoir des goûts aussi éclectiques !!!