Dead Can Dance – Dyonisus

Dyonisus
Dead Can Dance
PIAS
2018
Thierry Folcher

Dead Can Dance – Dyonisus

Dead Can Dance Dyonisus

Les annonces de sorties d’album n’ont pas toujours le même effet sur moi. Selon l’attachement que je porte vis-à-vis de tel ou tel artiste, ma réaction peut aller de l’indifférence à l’enthousiasme mesuré pour atteindre quelquefois l’impatience incontrôlée. L’annonce d’un nouveau Dead Can Dance m’a immédiatement mis en ébullition, à tel point qu’il fallait que je sache si c’était un album studio, une compil, des remix ou même un live. Dyonisus, qui débarque en ce mois de novembre 2018, est bien leur véritable neuvième effort studio et se compose de deux actes regroupant sept nouveaux morceaux. Brendan Perry et Lisa Gerrard continuent donc l’aventure DCD pour notre plus grand plaisir. Il faut dire que depuis les années 80, années maudites pour le rock, ce groupe a toujours fait figure de refuge musical vers lequel on pouvait accoster sans crainte. Leur « coldwave » en avait surpris plus d’un en mêlant musiques anciennes, folklore et rythmes tribaux. Un cocktail assez improbable mais séduisant porté par les superbes voix de Lisa et de Brendan. Cela dit, l’histoire de Dead Can Dance n’est pas un long fleuve tranquille et nos amis australiens nous ont habitués à des rebondissements de carrière fréquents. On a frôlé la mort plusieurs fois et chaque résurrection est vécue à la hauteur de l’événement. Alors ne boudons pas notre plaisir et plongeons tête première dans l’univers magique des « morts qui dansent ».

Dyonisus fait suite à l’excellent Anastasis paru en 2012 et qui fut une réelle bonne surprise. DCD refaisait surface après seize ans d’interruption avec cet album assez classique mais terriblement attachant. On parle souvent de l’extraordinaire voix de Lisa Gerrard, mais je vous invite à écouter « Amnesia » pour prendre la mesure des capacités vocales de Brendan Perry. Son timbre clair et envoûtant a fait de ce titre la plus belle chose enregistrée par Dead Can Dance depuis longtemps. La pochette d’Anastasis est en noir et blanc, par contre celle de Dyonisus est très colorée. Bizarrement, j’ai la sensation que l’inverse aurait été plus judicieux tellement Anastasis était un retour à la lumière alors que Dyonisus est plus aventureux et moins facile d’accès. L’artwork de ce dernier est assez énigmatique et les crédits très succincts. On y apprend que l’album a été enregistré en Bretagne et masterisé aux studios Abbey Road de Londres, et c’est tout ! Le nom de Brendan Perry n’apparaît que comme auteur du design et de la photo et celui de Lisa Gerrard est complètement absent, serait-ce un présage ? Seule piste sérieuse, le titre Dyonisus qui fait référence au dieu de la mythologie grecque et à toute la démesure qui l’accompagne. Allait-on assister à une orgie musicale et à une débauche sonore venue de la méditerranée ? C’est en partie vrai, mais pas pour le côté orgiaque, seulement 36 minutes, on repassera pour le trop plein. Bon, maintenant je vais être clair, cet album ne va pas laisser indiffèrent, il risque même de diviser ceux qui attendaient confortablement la suite d’Anastasis et ceux qui espéraient de la nouveauté et une prise de risque.

Dead Can Dance Dyonisus Band 1

Car, autant le dire tout de suite, Dyonisus n’est pas la suite d’Anastasis, bien au contraire. La première écoute va en laisser plus d’un au bord du chemin en criant au scandale. Mais quel est l’intérêt de reproduire sans cesse les mêmes concepts ? L’industrie musicale est pleine de ces artistes qui refont « ad nauseam » des albums identiques. On écoute, on est en territoire connu, et on oublie. Je le répète Dyonisus va faire parler de lui et diviser. Pourtant, dés les premières mesures de « Sea Borne », on retrouve le son si caractéristique de Dead Can Dance. Un son majestueux fait de percussions répétitives et de claviers calés sur notre respiration. L’ambiance est ouvertement orientale et le sera sur tout l’album. Seulement voilà, on attend la voix de Brendan ou de Lisa et elle ne vient pas. Il faudra être patient, très patient car ce premier acte, divisé en trois titres, est entièrement instrumental. Et c’est là que certains fans vont dire : « mais comment, avec des voix pareilles, c’est un gâchis monstrueux !» C’est pas faux, mais la musique chez DCD a aussi son importance. « Liberator Of Mind » le prouve avec une production extraordinaire et des vocalises de Lisa très judicieusement posées sur ce morceau et sur le suivant, « Dance Of The Bacchantes », comme pour dire : « vous voyez, je suis bien là ». Ce premier acte est un enchaînement de danses orientales qui va vous mettre en transe et sortir de l’habituel maelstrom de musiques tièdes et fadasses.

Le deuxième acte débute par « The Mountain » aux intonations celtes et orientales. Les voix tant attendues font enfin leur apparition avec Brendan en lead et Lisa en vocalises. Du pur DCD qui annonce une deuxième partie plus conforme aux attentes. « The Invocation » nous envoie en Europe centrale dans le style des voix bulgares où Lisa excelle. « The Forest » est pour moi le moment de grâce de l’album. Brendan chante toujours aussi bien et Lisa apporte cette touche si particulière permettant de sublimer le morceau. Une merveille de plus à accrocher à la collection des plus beaux moments de leur discographie. « Psychopomp » termine ce (trop) court album en une sorte de méditation parsemée de bruits de la nature. Brendan et Lisa se partagent le chant pour finir symboliquement cet album à deux. Cela dit, on est bien obligé de constater que Dyonisus est avant tout le fruit des expériences vécues par Brendan Perry lors de ses pérégrinations autour du monde. Le langage, les instruments, la thématique sont tous issus de sa propre volonté. Alors pourquoi en faire un album de Dead Can Dance ? Simplement parce que Lisa Gerrard, même à minima, fait toute la différence et permet à Dyonisus de prendre une autre dimension. Brendan Perry le sait bien et le succès de Dead Can Dance repose avant tout sur ce partenariat unique.

Dead Can Dance Dyonisus Band 2

Que vous soyez fan ou non de Dead Can Dance vous vous ferez votre propre opinion sur ce Dyonisus forcément atypique. La carrière de DCD est tellement riche que l’on peut toujours trouver à redire sur ce neuvième album. Pour ma part, sans atteindre l’extase, j’ai trouvé fort plaisant ce bref voyage au pays des rythmes et des chants profonds. La grande satisfaction est que ce groupe majeur continue sa route en nous faisant toujours autant vibrer. Et puis, rien de tel qu’un bon débat pour maintenir en vie le rêve et l’aventure.

https://www.deadcandance.com/

 

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