Chaos Echoes – Tone Of Things To Come
Chaos Echoes
Chaos Echoes Records 2012/Debemur Mortii Productions
Chaos Echoes représente la dernière marche avant le saut vers l’inconnu, celle où on se positionne devant un précipice. Là, devant nous, se trouvent les abîmes de la conscience, la frontière avec le tangible, la mort et la vie… Il y a encore un an, je n’aurais même pas écrit ça et encore moins pensé à rédiger une ligne pour Chaos Echoes. La faute à qui, ou à quoi ? À ces putains de MP3 qui envahissent la toile, m’ayant donné un aperçu sommaire et pas vraiment convaincant. Si je cherche à rattraper mon erreur, c’est que, déjà, j’étais présent à leur premier concert (délectable) et que, en plus, je peux dorénavant savourer du son vinyle de leurs compositions. Je suis donc sur cette marche, légèrement penché, l’inconnu me tend les bras. Le groupe tenu par les frères Uibo est la passerelle sur laquelle je vais poser mon premier pas peu assuré. Pour cela, ces derniers vont sortir l’artillerie lourde. Je pense toujours à Incantation, riffs gras et entêtants, ainsi qu’aux plans les plus mystiques de Morbid Angel que nous concocte ce taré de Trey Azagthoth.
Mais, à cela, Chaos Echoes incorpore d’autres ingrédients. Une part d’improvisation, forcément bienvenue, qui rompt radicalement avec le style carré jusqu’au dégueulement, ainsi qu’une bonne dose d’expérimentation psychédélique rappelant quelque-part l’âge d’or des seventies, avec effets analogiques souterrains, percussions aux limites du jam. Tout concorde à créer un véritable voyage sensitif, une expérience orageuse et physique où le corps se détache, où l’esprit vagabonde dans la vallée de la Mort. Rarement je peux dire que le metal extrême m’a emmené aux confins de ces endroits inaccessibles, ces dimensions parallèles, la connaissance interdite par les dogmes religieux et sociaux, la liberté, la vraie, celle qui n’est pas sponsorisée.
Là, bien évidemment, c’est le cas. Cette œuvre procure ce plaisir, nous immerge plus loin dans les profondeurs, les abysses de l’âme. Chaque note acquiert son importance, sa part d’existence dans ce puzzle vivace, organique et transcendant. L’écoute de « Tone Of Things To Come » amène le ressenti, et ce uniquement par son caractère, son atmosphère délétère, ses peintures morbides et ésotériques, entre Paul Rumsey et Thomas Hooper. Je pourrais bien chipoter sur les voix, pas réellement nécessaires mais néanmoins rares, à tel point qu’on les élude du geste d’écoute.
Cependant, on se rend vite compte que l’intérêt est ailleurs, plus loin, sépulcral et invisible. L’atmosphère semble même se décomposer, le titre final dématérialisant, scrupuleusement, la masse tectonique. Avec juste un mini en poche, Chaos Echoes évite l’ennui quotidien et routinier tout en se hissant largement dans le registre du très fréquentable. J’ai bel et bien fait une erreur, je la répare. Pour cause, j’écoute le vinyle quasi en boucle !
Jérémy Urbain (8/10)
Pour écouter/télécharger l’album :
http://chaosechoes.bandcamp.com/album/tone-of-things-to-come