Bitter Heart – Rotten
Autoproduction
2018
Rudzik
Bitter Heart – Rotten
Mon Bitter Heart se Rotten quand me tombe entre les pattes une galette provenant d’une contrée exotique, d’un point de vue « racines du rock ». Ceux qui me lisent ont pu noter que j’ai une sensibilité toute particulière pour ces groupes qui se battent pour faire vivre dans leur pays la musique qui les fait vibrer. C’est le cas de The Dizzy Brains à Madagascar, combo qui ajoute même à ce handicap le fait d’être très engagé contre le système.
Pour en avoir parlé avec les ptits gars de Myrath, excellent groupe tunisien de metal oriental, la Tunisie n’est pas non plus une contrée où le metal est en odeur de sainteté. Bien que eux, leurs textes ne relatent que des histoires d’amour, les médias tunisiens diabolisent régulièrement leur musique tout ça parce qu’elle est trop éloignée des standards mainstream de ce pays. Je ne sais pas si Bitter Heart, également des tunisiens, sont prophètes dans leur pays mais il m’est apparu opportun de donner un éclairage sur leur premier et prometteur album Rotten.
Nous avons ici affaire à un power trio qui combine des influences provenant du grunge, du metal et du stoner. J’ai vraiment craqué sur le répertoire de riffs délivré par Melik Melek Khelifa sur l’ensemble de l’album dont la consistance et la variété lui donne une fantastique puissance. En témoigne ce premier titre emblématique, « Heartless », auquel on ne reprochera que sa durée beaucoup trop courte, lui qui, rythmé par la caisse d’airain de Selim Jabbes, s’achève au moment où la guitare atteint sa plénitude. Heureusement, lui succède ensuite le mid-tempo bien plombé « Kill Your Dreams ». Les influences grunge (Alice In Chains dixit le groupe) transpirent beaucoup plus à partir du troisième morceau, « She Kills Me More », bien que son rythme soit endiablé et son final de riffs proprement époustouflant.
Ensuite survient le hic de l’album. Le stonerien « Rotten » démarre pourtant très bien avec un riff rocailleux mais le chant en chorale du groupe presque façon sixties est lénifiant et modère l’excellente qualité du titre. On retrouve ce défaut sur le morceau suivant, «Grave Digger», et à chaque fois, ce sont des riffs étonnants de puissance qui permettent à ces chansons de surnager. Vous l’avez compris, je préfère de beaucoup quand Melik envoie la purée vocale en solo comme sur « Psychopathic Evil Woman From Hell » que platement, en choeur, comme pour les deux morceaux précités. Mais bon sang, mais c’est bien sûr ! Ca me renvoie à ce qui m’énervait dans le grunge, ce chant plat et traînant qui m’assomait.
La richesse rythmique de la guitare acoustique de «Lose Myself» réussit mieux à faire prendre la mayonaise « grungy » sur cette plage, question d’ambiance peut-être ou bien est-ce le superbe solo de guitare qu’elle recèle qui la transcende ? Toujours est-il qu’une petite incursion vers le punkrock avec « Psychopathic Evil Woman From Hell », ça fait du bien.
Ensuite, vient le moment du très poétique « Dance Motherfucker Little Piece Of Shit », qui doit certainement illustrer le complexe d’Oedipe de notre cher trio, avec quelques incursions psychédéliques de claviers. Retour au péché mignon du groupe avec l’énorme mid tempo « Cosmic Orgasmic », habillé d’un duo de voix languissantes mais clairement plus convaincant grâce probablement à la participation de Jelena Dobric du groupe Persona (http://www.facebook.com/personaband), l’autre groupe de Melik Melek Khelifa. Cette chanson est rehaussée par les énormes slides de basse de Dawser Kheddher et encore par un solo de guitare divin. Bitter Heart a le bon goût d’accélérer le rythme pour un final d’une puissance qui me laisse exsangue. Après tout, c’est bien comme ça que l’on arrive à l’orgasme non ? Hola ! Il est temps de se calmer… avec un dernier instrumental très planant, certainement la « petite mort post-orgasmique » de l’homme; mais qu’est-ce qui m’arrive moi ? Pourtant je vous jure que je n’ai pas pris de petite pilule bleue !
Le moment est venu de dresser un bilan très encourageant de Rotten qui, pour un premier jet, nous emmène fréquemment vers un orgasme guitaristique puissant mais non démonstratif avec toutefois, un petit bémol côté chant qui a tendance parfois à « bander mou ». Mais, pour les vrais amateurs de grunge dont je ne fais pas partie, l’amalgame pourra être considéré comme particulièrement réussi.
Merci pour cette chronique .
Contents que notre album vous ai plu ! 🙂