Zbigniew Preisner – Bleu

Bleu (BOF)
Zbigniew Preisner
1993
Virgin Music

Zbigniew Preisner – Bleu

Véritable double musical du génial cinéaste polonais Krzysztof Kieślowski (RIP), Zbigniew Preisner a signé brillamment, entre autres, la totalité des bandes originales de la magnifique trilogie « Bleu, Blanc, Rouge ». Son premier volet, réalisé en 1993 et porté à bout de bras et avec une grâce magistrale par la divine Juliette Binoche dans le rôle de Julie, narre l’histoire tragique de cette femme qui perd à la fois son époux et sa fille dans un terrible accident de voiture. Brisée par le chagrin, elle liquide alors tous ses biens puis part s’installer à Paris. Pour ce drame, où chaque plan est nimbé par la couleur bleue (les premières séquences débutent ainsi sur l’asphalte bleutée), Zbigniew Preisner signe une de ses plus belles partitions. Ce parfait autodidacte, ayant effectué des études de philosophie et d’histoire à Varsovie, démontre en effet ici des talents de compositeur émérite (avec parfois force trompettes, chœurs et sopranos à l’appui).

Ses vingt cinq chapitres mélodiques décrivent à merveille la lente descente aux enfers de Julie qui espère se libérer, un beau jour, du chagrin dans lequel elle s’emmure. Elle finira par comprendre qu’il lui faut l’affronter et voir enfin la vérité en face. Mais les choses ne sont pas si faciles et la belle Juliette Binoche ne trouve, pendant longtemps, le réconfort que dans l’eau bleue de la piscine : elle s’y réfugie alors en position fœtale pour que le silence la protège. Mue un beau jour par une volonté aussi soudaine que quasi miraculeuse, elle décide de composer sa grande œuvre, une symphonie restée longtemps en germe (« Le Concerto Pour La Réunification De L’Europe ») avec l’aide du pianiste Olivier (Benoît Régent) dont elle tombera follement amoureuse et qui la ramènera finalement à la vie.

Tour à tour langoureuse (le très beau diptyque « Song For The Unification Of Europe », qui démarre et clôt le disque en beauté), sombre (« Van Den Budenmayer – Funeral Music », plage deux) puis amoureuse (« Olivier’s Theme-Piano »), la partition grand teint de Preisner fait preuve d’une fascination évidente pour l’œuvre de Sibelius, notamment dans l’art des transitions subtiles (citons un peu au hasard « First Flute », « Second Flute », « Ellipsis 2 » et enfin « Ellipsis 3 »). On relève aussi quelques touches de Satie (« Olivier’s Theme-Piano ») voire de Jean-Sébastien Bach (la suite en deux mouvements « Van Den Bundenmayer – Funeral Music », interprétée à l’orgue d’église sur les mémorables plages treize et quatorze).

Toutes les émotions sont brillamment mises en musique par le maître Preisner, même les plus impudiques (ce merveilleux long métrage se termine ainsi par les furieux ébats sexuels de Julie et Benoît, emportés par le thème magique de « Song For The Unification Of Europe »). Un magnifique hymne à la vie et à l’amour.

Bertrand Pourcheron (8,5/10)

http://www.preisner.com/

[responsive_vid]

2 commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.