Unsane – Occupational Hazard

Occupational Hazard
Unsane
1998
Relapse Records

Unsane-Occupational-Hazard

Tu ne voulais pas aller à Big Apple. T’es venu quand même, quémandant du pognon, rackettant ta grand-mère au passage à l’hospice du coin. Et t’as aimé ça ! T’es allé à l’aéroport. Tu t’es fait confisquer tes cinq litres d’alcool. Tu croyais que ceux du Nouveau-Monde ne valaient pas tripette. T’as gueulé, en perte minable et sans envergure. Tu t’es shooté aux tranquillisants. L’avion ? T’aime pas ça. T’es arrivé, t’as pris un taxi pouilleux. Le chauffeur sikh a rigolé quand tu lui as donné  l’adresse. Il croyait que c’était une blague, l’empaffé. T’as donné le pourlingue et il t’a emmené. T’es passé sur ce pont, tu sentais l’odeur du sang frais, d’un énième crime non élucidé qui allait servir au scénariste opportuniste de New-York Police d’Etat. T’as vu le sang, coagulé, tel une fresque contemporaine, le clochard qui tire son caddie en dégueulant sa bière tiédasse et sa haine de la société, tu l’as entraperçu. Un sourire s’est dessiné sur ton visage de bâtard. T’as allumé ta clope. Le sikh t’a déposé dans une rue dégueulasse. La grève des éboueurs est journalière dans ce bled. Seul un chien errant te souhaite bienvenu, bavant, grognant, renversant la seule poubelle debout, pendant que le taxi redémarre en troisième. Quel con…

Tu traverses la rue sous l’œil du dealer de crack matinal, à 19h. Ce bar, ça ne te dit rien, l’enseigne déjà, « Occupationnal Hazard » ? Portnawak c’te nom ! Mais t’en as dans le ventre. Donc, tu rentres. Chier ! On voit rien là-dedans. Un malabar tatoué te toise. Il te cherche le salaud ! Un signe, un doigt pointé. Tu es. La salle est brumeuse, Les relents de shit coupé au pneu Goodyear copulent avec les senteurs de gnioles renversées sur le bar. T’aimes ça. Tu commandes la bière. Tu commences à te sentir bien. L’ambiance te plait. Le groupe joue. Tu les vois à peine devant l’éclairage défectueux. La fumée est pire que dans le film « Fog » de Carpenter. Et là-dessus, ça groove, ça dégueule du larsen à faire péter l’ampli. C’est un blues cradingue boosté aux amphets.

Tu bouges ta tête malgré toi, tellement que c’est lourd et galvanisant, ta bière se renverse. Un mec t’agrippe par l’épaule. Tu piges que dalle à ce qu’il dit cet amerloque. Il t’insulte où il est tellement bourré qu’il veut te rouler une galoche ? Tu t’en fous, tu le repousses en commandant une autre bière, comme dans la taverne de Moe. Un mec s’écroule sur un son de basse dévastateur. Minable… Une fille sort des chiottes colonisés par les mouches, le futal même pas remis, bave et sperme aux lèvres. Salope ! Elle m’a fait loupé le refrain, cette dondon. Ah, mais ce qu’il commence à faire chaud là-dedans. Tu titubes mon gars, pas vrai ? Allez va dehors en râlant.

Tu prendras l’air, comme ça. T’allume ta malbac. Tu regardes la fumée qui s’évapore dans la nuit, entrecoupé par les sirènes des poulets et une profonde envie de pisser. Une femme gueule dans le quartier. Tu regardes en l’air, benêt que tu es. Tu sens une ombre sur toi. L’espace d’un instant,  il te semble reconnaître l’enfoiré torché qui t’avait attrapé l’épaule. Ça, c’était avant que tu ne reçoives le premier coup de batte dans la gueule. Tu t’écroules, les coups pleuvent. Tu ne cries même pas, t’as plus de mâchoire d’ailleurs. Tes côtes ne sont même pas récupérables pour un boucher. Et pendant ce temps-là, le groupe joue, fort, même si le sang dans les oreilles t’empêche d’entendre. Tu crois que tu l’entends, et toi, tu souris…

Jérémy Urbain (8,5/10)

http://www.unsanenyc.com/

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.