Steve Hogarth – Ice Cream Genius

Ice Cream Genius
Steve Hogarth
2002
Castle Communications

Steve Hogarth – Ice Cream Genius

Steve Hogarth est un grand Monsieur, un artiste au sens noble du terme, et « Ice Cream Genius » a ce parfum d’authenticité des œuvres dans lesquelles leur créateur s’investit tout entier. Là où tant d’autres se complaisent dans des poses préfabriquées de rock-star à la petite semaine, h se livre tel qu’en lui-même, sans retenue ni faux-semblants. Si, dans Marillion, il peut être prisonnier d’une image, d’une fonction, d’une identité musicale, cet album vient à point nommé rappeler que l’ami Steve ne saurait être réduit à son simple rôle de chanteur, aussi exceptionnel soit-il, du plus grand groupe progressif du monde. Hogarth est avant tout un musicien de grande classe et un créateur authentique, éclectique et passionné. Remarquez, on connaissait son potentiel depuis l’époque lointaine des Europeans et de How We Live. On n’est donc pas surpris qu’entouré d’une brochette de talents fameux (Richard Barbieri, ex-Japan et Porcupine Tree aux synthés, David Gregory d’XTC et de Big Big Train à la guitare, Clem Burke à la batterie, Blondie Chucho Merchan à la basse, tous issus de groupes prestigieux), ce potentiel parvienne à un tel degré d’achèvement !

Le maître mot de « Ice Cream Genius » est sensibilité, une sensibilité frémissante, à fleur de peau qui s’exprime peu dans l’explosion emphatique, à l’exception notable du final de « Nothing To Declare », mais plutôt dans un chant intimiste, parfois murmuré (« Cage ») et profondément émouvant. Musicalement, on a affaire ici à un patchwork surprenant, éclectique mais cohérent. L’extrême richesse d’une inspiration qui ne faiblit jamais va d’épanchements rock imparables, où l’on voit que l’enfance hogarthienne fut bercée par les Beatles ou les Doors (« Really Like », « You Dinosaur Thing ») à des titres inclassables, souvent méditatifs avec des arrangements fort variés.

Si avec le symphonisme de « Better Dreams »  on est en terrain de connaissance, « The Evening Shadow » ou « The Deep Water » nous embarquent dans un univers aussi irréel qu’inclassable qui n’est pas sans rappeler, de manière fugace, le Robert Wyatt de « Rock Bottom » : mélange troublant d’onirisme et de candeur, de fausse simplicité et d’expérimentation. On mesure alors mieux l’importance majeure qu’a prise le père h au sein de Marillion et son rôle clef dans l’alchimie du combo : des pièces comme « Brave » ou « Beyond You »  trouvent un large écho sur ces longues ballades existentielles que sont « The Deep Water » ou « Better Dreams ».

Au final, par sa volonté farouche d’indépendance combinée à une sensibilité à fleur de peau, Steve Hogarth signe ici une œuvre magistrale qui fait la nique à bon nombre d’albums progressifs (régressifs ?) « politiquement corrects ». C’est qu’ »Ice Cream Genius » est un opus enthousiasmant grâce à sa profonde authenticité, son absolue sincérité et son éclectisme. Et, pas dessus tout, cette musique a une putain d’âme : n’est-ce pas là l’essentiel ?

Bertrand Pourcheron (10/10)

http://www.stevehogarth.com/

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