Opeth – In Cauda Venenum

In Cauda Venenum
Opeth
Moderbolaget / Nuclear Blast
2019
Rudzik

Opeth – In Cauda Venenum

Opeth In Cauda Venenum

Les clous sont faits pour être enfoncés. En cela, avec In Cauda Venenum, Opeth semble avoir définitivement martelé le sien dans le metal progressif, reléguant son death-metal aux oubliettes, en particulier son chant d’outre-tombe si caractéristique de ce style. En paraphrasant le titre de cet album, je dirais qu’il a circonscrit son venin mortel à sa queue. Contrairement à ce qu’en pensent ses fans de la première heure, Opeth n’a pas totalement vidé d’agressivité toute sa musique même si sa production ne présente plus la constante mortifère death métallique.
Son leader charismatique Mikael Åkerfeldt a négocié avec son groupe un périlleux virage vers le progressif très teinté des années soixante-dix. Il en a profité pour y explorer tous les chemins de traverse des genres de musique qu’on peut y mixer. Les riffs n’ont pas été gommés du répertoire d’Opeth et impriment toujours cette puissance d’airain sur chaque titre d’In Cauda Venenum. C’est juste que désormais, ils doivent composer avec des parties de jazz, de folk, de psyché, de stoner et confèrent régulièrement un côté doom prononcé à l’ensemble.

Opeth In Cauda Venenum band1
Le ton était donné dès la sortie des simples l’été dernier. Ainsi « Heart In Hand » publié en juin démarre sur un rythme syncopé et nerveux pour se déchaîner en mur de son stratosphérique de sonorités psychées avant un final acoustique inattendu pendant près de neuf minutes : pas mal comme durée pour un « simple » ! Au mois d’août, un « Dignity » mutant faisait la part belle à la basse ondoyante de Martín Méndez mais, là encore, un passage folk venait surprendre tout son beau monde jetant un pont vers une partie typée mid-tempo de hard rock psyché. Étonnamment, les chœurs habillant ce passage m’avaient carrément fait penser à ceux de… Barclay James Harvest. On aura tout vu !
Pour parler de ce qui fâche (enfin qui « me » fâche même si le terme est un peu fort), j’ai un peu de mal avec la reverb presque systématique sur le chant de Mikael (comme sur le refrain de « Charlatan ») et c’était déjà le cas pour Sorceress. C’est certainement voulu pour accentuer ce parfum vintage qui caractérise désormais Opeth mais bon, « en toute chose il faut savoir raison garder ». Autre truc qui peut lasser, c’est ce côté pompeux renforcé par une orchestration parfois envahissante comme sur « Next Of Kin ». Ceci dit, c’est aussi ce qui donne toute sa majesté à In Cauda Venenum, donc c’est finalement une affaire de goût. Il faut noter aussi que le positionnement judicieux des plages contrebalance adéquatement ces lourdeurs. Ainsi, le titre précédent est suivi de l’agréable ballade « Lovelorn Crime » plus sage et dépouillée.
C’est sur « Universal Truth » que le côté prog 70’s apparaît le plus criant en particulier d’un point de vue chant et surtout par ses chœurs crimsoniens. La partie finale de ce morceau alternatif et teinté d’oriental propose un couplet dont le phrasé m’a fait penser au « You Never Give Me Your Money » des Beatles. OK Abbey Road n’est pas 70’s mais seulement à trois mois près.

Opeth In Cauda Venenum band2
Pour ce qui est des chemins de traverse, on les explorera surtout sur « The Garroter » avec son introduction de guitare flamenco suivi d’un improbable rythme jazzy sombre comme du… doom. Pour « Continuum », c’est un enchaînement de funk, de hard rock et de folk qui sème le chaud et le froid sur cette galette. Comme si l’éclectisme d’Opeth méritait une nouvelle démonstration, le saurien « All Things Will Pass » clôture In Cauda Venenum avec un doom abyssal rythmé par trois notes de basses envoûtantes.
En terme d’envoûtement, nul doute que Mikael Åkerfeldt l’est par cette décennie musicale des « années septantes » même si la production et les sonorités instrumentales sont totalement modernes (merci à son mentor Steven Wilson). Alors, il faut se réjouir de la fidélité aux origines de cette musique qu’il exprime désormais pleinement avec Opeth et qu’il montre doublement du fait qu’In Cauda Venenum est également sorti dans la langue de Stieg Larsson, le célèbre auteur suédois de la trilogie Millenium, qui est également celle des membres du groupe. Plutôt sympa cette fidélité à leurs racines !
Alors qu’il soit dit qu’Opeth a confirmé son désir de ne plus cacher ses penchants progressifs telle une maladie honteuse mutante. Un peu comme les super-héros, les Suédois ont tourné cette mutation à leur avantage. Deviendront-ils les super-héros du prog ?

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