Nurse With Wounds – Salt Marie Celeste

Salt Marie Celeste
Nurse With Wounds
2003
United Dairies

Nurse With Wounds – Salt Marie Celeste

Dans le registre du « je-te-fous-les-chocottes-avec-trois-fois-rien », « Salt Marie Celeste » se pose là. Ah ça, cet album marque des galons. Steve Stapleton a fait fort, très fort. Lui qui, avec une miryades d’albums tous plus fous et surréalistes les uns avec les autres, nous a aventuré dans des labyrinthes de collages à la frontière de la perversité, le voilà qu’il nous pond le voyage le plus sombre depuis des lustres. N’empêche, faut le faire. Créer et poser une ambiance avec des moyens aussi réduits, une palette sonore aussi réduite, y’a de quoi faire enrager n’importe quel tripatouilleur de son (le moins qu’on puisse dire, c’est que c’est réussi). Car oui, Nurse With Wounds, ce n’est pas vraiment ce qu’on pourrait appeler de la musique, au sens large. On pencherait plutôt vers un triturage/collage de matières hétéroclites sur de longues pièces possedant une vie propre. Inclassable par nature, le style Nurse With Wounds est comme un laboratoire d’alchimiste, plein de couleurs, de fumée et de bouillonnement.

« Salt Marie Celeste » c’est une pure pièce d’ambient glauque, fantastique et surtout humide (bien que difficilement catégorisable). C’est avant tout ce drone, hypnotique, qui se répète inlassablement, revenant sans cesse, dessinant une mer agitée par une tempète (aux origines surnaturelles) où règne l’obscurité la plus complète. Pourtant, un navire est balloté par les vagues et les remous. Il apparait, là, de nulle-part. Nul ne connait sa provenance et encore moins sa destination. Il se déplace, poussé par ces incessants remous vindicatifs. Les voiles sont déchirées, le pavillon manquant. On s’étonne que l’océan n’ait pas encore emporté sa proie au fond des abymes, comme s’il jouait avec.

Sur le pont, personne. Le vaisseau est vide. Du moins le croyons nous… Le vent est fort. La structure du bateau en souffre. Grincements, craquements, la charpente tient on ne sait comment. Qu’est-ce qui est à l’oeuvre en ces lieux ? On ne le saura jamais. Stapleton joue avec nous, il ne dévoile pas toutes ses cartes. Il les pose, une par une. Il adjoint, lentement mais surement, ces variations imposant l’ambiance, nous faisant rentrer dans la carcasse de cette épave face aux éléments. Les grincements de bois enflent. On tourne la tête à chaque son, paniqué… Je veux sortir de là !! Mais une voix, au fond de moi me force à poursuivre l’exploration. Est-ce une silhouette que j’aperçois l’espace d’une seconde ou est-ce uniquement mes sens qui me jouent des tours ? Je crois tenir la réponse mais je me sens partir, je ne suis plus sur ce navire. Je reste là, je regarde le vaisseau s’éloigner dans cette tempête qui fait corps avec lui. Je reste, subjugué par sa taille colossale, ses mats tels des épées dardant le ciel opaque. Inlassablement, le voilier disparaît, petit à petit, sans se presser, comme s’il fallait que je ne perde pas une miette du spectacle. Peut-être peindrais-je un tableau pour immortaliser ce moment…

Je reviens à la réalité. Un rêve ? Une vision de l’au-delà ? Bizaremment, je pencherai pour les deux… Gargl… « Salt Marie Celeste » me fera toujours cette impression à chaque écoute. C’est comme si on était à bord du Black Pearl, que « Pirates Des Caraïbes » était un film d’épouvante chapeauté par la Hammer Film et réalisé par Werner Herzog. Attention ! Le mal de mer n’est pas ce qui vous guette le plus…

Jérémy Urbain (8,5/10)

http://www.brainwashed.com/nww/

 

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