Mongol – Doppler 444

Doppler 444
Mongol
1997/2013
Belle Antique/musea

Mongol - Doppler 444

Après l’unique album culte d’Ataraxia et le second chef d’œuvre symphonique de Providence, tous deux à nouveau disponibles au format CD cette année grâce au label Musea, ce dernier poursuit son travail de réédition des trésors de brocante du patrimoine progressif japonais avec « Doppler 444 » du groupe Mongol. Sous ce patronyme qui en fera peut-être bêtement pouffer certains (oui oui, vous ! On vous a reconnus !) se dissimule l’un des meilleurs groupes nippons de ces dernières années, dont l’unique opus, résolument ancré comme les œuvres de ses compatriotes de Kenso ou Ain Soph dans le genre jazz-rock fusion, avait complètement disparu de la circulation depuis des lustres. La genèse de Mongol remonte au cœur des seventies avec la rencontre du claviériste Takeshi « Mongol » Yasumoto (un expert reconnu en musiques progressives françaises de l’époque !) et du guitariste Ken’ichi Takasaki. Les deux sbires, autour desquels gravite une multitude d’électrons libres, commencent séance tenante à bâtir un répertoire à fortes consonances hard-rock, influencé par les travaux de groupes tels que Tempest ou Colosseum 2.

Peu satisfait de cette orientation, Takeshi, qui a entre-temps flashé sur les albums de Magma, Atoll, Soft Machine ou Gentle Giant, décide de mettre le groupe en sommeil jusqu’en 1982. Entouré de nouveaux musiciens, il s’attelle alors à la composition de morceaux plus en adéquation avec sa personnalité, ses influences et ses aspirations créatives. Après de multiples remaniements de personnel et la tenue, courant 1988, du seul et unique concert donné par la formation à ce jour (lequel coïncidera du reste avec le départ de Ken’ichi Takasaki, remplacé à la guitare par Hirofumi « Driller » Miloma), Mongol décide de plancher sur son premier opus. Après huit longues années de gestation, « Doppler 444 » voit enfin le jour en 1997 et, le moins que l’on puisse dire, est que l’attente aura valu le déplacement.

Cet essai aplati au centre et transformé en finesse présente, en effet, une fusion instrumentale de très bel éclat. Propulsées par une rythmique à la précision redoutable (Naoto « Ultra-Pump » Amazaki à la basse fretless et Kiyoshi « Stamper » Pochi-Imai derrière les fûts), les six compositions échevelées que nous présente ce superbe disque laissent le champ libre aux combats formidablement virtuoses et inspirés que se livrent à fleurets mouchetés les claviers « widemanniens » (aux sonorités un peu trop « clinquantes » toutefois) du maître de cérémonie et la guitare « holdsworthienne » de son acolyte Hirofumi. Le disque évoque tour à tour le Camel de « Mirage » (le jouissif morceau d’ouverture « From The Beyond/Doppler 444 »), le Kenso le plus stratosphérique (le classieux « Garadama ») ou le Jean-Paul Prat le plus tellurique (le furieux « Driller »).

Cette œuvre de haut vol se conclue sur une époustouflante suite de 18’12 baptisée « Greatful Paradise », au sein de laquelle les influences de Magma (plus « De Futura » que ça tu meurs !), Weidorje (émanation du groupe de Christian Vander emmenée par le bassiste Bernard Paganotti), voire Univers Zéro se succèdent avec force et intelligence. La grande classe ! Cette réédition 2013 se voit augmentée de trois titres bonus live à la prise de son plus que correcte, avec en premier lieu une composition inédite (« Lammy ») qui se voit agrémentée de quelques sections du célèbre « Hhai » de Magma. On découvrira aussi une version survitaminée de « Merazoma » qui, par son déferlement de notes synthétiques et sa structure un peu moins alambiquée que son modèle original, prend une certaine dimension « space-rock » pas déplaisante à la manière d’Ozric Tentacles.

Pour conclure, le combo nous délivre « Greatful Dead », une ébauche en public de ce qui allait devenir la longue suite aux accents zeuhl « Greatful Paradise », LE gros morceau de ce « Doppler 444 » décidément plus que fréquentable. Une réédition fort bienvenue donc, qui fera le bonheur des collectionneurs à qui il manquait cette pièce de choix, et à tous les amateurs de fusion instrumentale pétaradante, à mi-chemin entre le rock progressif aventureux et le jazz-rock débridé. Excellent !

Bertrand Pourcheron & Philippe Vallin (8/10)

http://www.musearecords.com/

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