LuneApache – Onironautes

Onironautes
LuneApache
Toolong Records / Differ-Ant
2019
Franck Houdy

LuneApache – Onironautes

LuneApache-Onironautes

C’est avec un appétit et une curiosité en éveil que j’ai cliqué sur le bouton Play du premier titre de l’album de LuneApache intitulé Onironautes et sorti en mars dernier. Force est de constater qu’après ses années de collaboration au sein de Boreal Wood, duo électro-pop qu’il partage avec Eliz Cervetti, Anthony Herbin a pris un nouvel angle d’attaque musical avec son LuneApache. Il délaisse donc la prédominance de sons électros pour s’offrir un voyage à travers le temps, réalisant des arrangements laissant place à des guitares atmosphériques, des nappes de claviers hargneuses ou vaporeuses qui ne manquent pas de nous évoquer les sonorités du claviériste des Doors, Ray Manzarek. L’identité texturale et textuelle du projet dessine un savant patchwork coloré, une voie musicale d’ouverture à une conscience spirituelle et à un ancrage profond à la Terre-mère. Le nom du projet prend ici tout son sens : LuneApache telle la résurgence musicale d’une vision mystique ancrée dans la matière.

Les chansons d’Onironautes résonnent de fortes teintes psychédéliques et d’un onirisme inspiré par la fin des 60’s. C’est par l’entremise d’un rock stylisé et habillé de mélodies accrocheuses que l’on se retrouve audioporté, dès l’introduction de cet album, vers un autre espace temps. Ce préambule en forme d’invitation à la transe, tire d’emblée un lien sonore vers Ian Anderson (Jethro Tull) par la présence fantomatique de la flûte traversière, instrument hautement identifié dans l’univers psychédélique. Cette flûte joue son rôle de guide et s’applique à nous propulser dans le vortex temporel. Le voyage commence…

LuneApache-Onironautes-band 1

Arrive la chanson-titre « Onironautes » avec sa section rythmique très pop à laquelle se mêlent l’orgue et la réverbération appliquée à la voix lead qui confirmera sa présence tout au long de ce trip musical tant extérieur qu’intérieur. Les notes des guitares malaxées d’effets remplacent ici les cithares (que l’on semble malgré tout entendre parfois, dans « Nébuleuses » par exemple) et autres instruments à cordes à haute densité vibratoire. Avec le titre « Nébuleuses », l’embarquement est définitif. Ce tube à la mélodie hyper efficace est une des très belles réussites de cet album. Suivi par la chanson « L’apesanteur », on s’offre ici le plaisir d’un long habillage au saxophone, instrument malmené dans les 80´s jusqu’au mauvais goût menant presque au dégoût. On le retrouve ici avec un plaisir renouvelé, se surprenant à en vouloir encore plus et à espérer qu’en live, LuneApache fasse de ce titre un grand trip hallucinogène emmené par un sax solo endiablé ! Tout s’enchaîne et sans plus se poser de questions, on erre avec allégresse de pulsions rock (« Légendes Païennes », « Onironautes », « Bardo, », « Funambules ») en désirs ondulatoires (« Intro, », « Les Persiennes »).

Les textes écrits en français s’imbriquent avec une grande fluidité dans les compositions. Si l’on peut cependant regretter un dosage un peu trop « en dedans » de la voix lead qui se retrouve parfois noyée dans les nuées d’effets au détriment d’un accès direct au texte, nous parvenons malgré tout à déceler qu’il y a ici, bel et bien, une plume. Anthony Herbin possède un sens de l’évocation sensorielle et un savoir-faire d’enlumineur. On navigue au cœur de mers colorées, de volutes sensorielles, de valeurs de partage, d’ouverture de conscience, de voyage et d’absolu, de pensées positives et toujours accessibles comme la pop se doit de les transmettre. Je dis bien « pop » car même si la signature rock psychédélique est très présente, il est impossible de ne pas entendre à quel point la base sous-jacente des chansons est pop. Et il est vrai qu’à l’écoute de certains titres on se surprend à penser à la sphère « Dahossienne »… L’évocation est plaisante.

LuneApache-Onironautes-band 2

La voix d’Anthony semble avoir été enregistrée avec un réel souci d’articulation et un ton empreint d’une nonchalance monocorde qui, s’il n’est pas volontaire est en tout cas totalement assumé. Ceci pourrait passer pour une vraie gageure réussie tant elle permet à l’auditeur de s’ombrer lentement dans l’univers sonore très ample de LuneApache. Le traitement d’effets appliqué aux voix parachève l’atmosphère de cette transe sculptée aux limites de l’expérience hallucinatoire. En clôture d’album, « Le monologue de Jane » s’étire, comme pour nous laisser le temps d’émerger. Par la voix de l’enfant, nous revenons à la réalité, avec douceur et vivacité. Ce titre a tout l’air d’une improvisation instrumentale à laquelle a été ajoutée ce monologue de Jane. Sans jamais le dire, la vocation de ce morceau semble de nous pousser à cultiver notre espièglerie et notre esprit de liberté. LuneApache nous livre un dernier message caché : écoutez l’enfant en vous et jouez la vie. Fin du voyage, la flûte boucle la boucle. Désormais libre à nous d’avancer, pas à pas, encore plus loin sur le chemin que nous venons d’ouvrir en collaboration avec LuneApache.

https://luneapache.bandcamp.com/

 

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