Khaosan Road – Khaosan Road

Khaosan Road
Khaosan Road
2012
Autoproduction

Khaosan Road – Khaosan Road

Khaosan Road est un tout nouveau projet musical collaboratif et expérimental mixant de nombreux styles et influences, emmené par Franck Rakotonirina, entre autres bassiste du trio parisien de rock psychédélique Mahatma Gandhi Road. Musicien et compositeur éclectique, Franck est également un multi-instrumentiste très doué, aussi à l’aise à la six-cordes qu’à l’harmonica blues, ou encore aux machines à programmations électroniques du genre groovebox et autres samplers. S’il fut jadis un grand amateur de rock progressif (pour le clin d’oeil, votre serviteur a été initié au genre par le personnage !), ce n’est certes pas la virtuosité et la complexité qui l’attirent aujourd’hui dans sa propre pratique instrumentale, plutôt axée sur la recherche et le modelage sonore, la création d’effets en tous genres, mais aussi le rock lourd, « sale », et enfin, les musiques qui « groovent » !

Franck, musicien au jeu sans frontière, est enfin un artiste avide de rencontres et d’improvisation collective, en témoignent la multiplicité des projets auxquels il a été associé : la genèse d’un groupe de musique pop-world malgache (Madagascar étant son pays d’origine), la réalisation d’un album et d’un concert avec les slammeurs de l’atelier intergénérationnel de Grand Corps Malade à Saint-Denis, où encore, sur ce même territoire de la banlieue Nord de Paris, les scènes ouvertes d’interactions poétiques et musicales que j’ai pu co-animer il y a quelques années avec lui au Café Culturel, espace dionysien incontournable dédié à l’expression artistique populaire et à la création. Ces aventures aujourd’hui terminées, les explorations tous azimuts du musicien underground prennent encore une nouvelle direction avec le projet qui nous intéresse ici.

Le « Khaosan Road » de Franck fait référence à ce fameux quartier des backpackers (ou « routards » si vous préférez) de Bangkok. Ce lieu de brassage culturel, presque sans équivalent dans le monde, n’a effet finalement plus rien de typiquement thaïlandais de par son cosmopolitisme sans cesse renouvelé par les hordes de voyageurs en transit. Cet endroit insolite et hautement bigarré colle donc parfaitement au concept de ce premier EP, à savoir une confluence de genres et de bagages musicaux, où s’entremêlent sonorités ambient, folk, effluves jazz, world music ou encore psychédéliques. L’enregistrement de « Khaosan Road », réalisé à partir d’une jam session à plusieurs musiciens orchestrée par Franck, a été mis en boite en une seule journée, le 30 juillet 2012, et le mini-album qui en découle regroupe 5 plages d’une durée comprise entre 2 et 8 minutes environ.

« Codeine », le titre d’ouverture, est très certainement le meilleur du lot, avec son ambiance on ne peut plus seventies, où guitares acoustiques, piano, flûte et contrebasse viennent broder un paysage bucolique sur fond de tampura indienne et son bourdon obsédant. Ce titre pourrait durer une éternité que cela ne gênerait personne, pas moi en tout cas ! Ce joli bordel assumé n’est d’ailleurs pas sans rappeler l’univers des premiers albums de Ben Chasny, alias Six Organs Of Admittance, où l’une des figures de proue mondiale de la new-folk, rien de moins. La seconde partie nous emmène dans une improvisation au piano posée sur drone, avec un résultat parfois proche de la musique concrète.

Puis c’est le retour aux sonorités folk avec « Maël&Trist », qui fait chanter la flûte sur des accords enlevés de guitare acoustique, générant une ambiance mi-urbaine, mi-pastorale étrange, décalée, avec toujours en toile de fond ces tapis sonores aux textures évoquant le « fields recording ». Vient ensuite « Interlude », une très jolie pièce typée « ambient », à la fois minimaliste et jazzy, jouée à la contrebasse, qui nous murmure ses notes avec douveur et feeling sur ce qui ressemble à une boucle de bol tibétain au son traficoté. Enfin, notre voyage en 5 cartes postales s’achève avec « Flute Guru », un titre assez joyeux qui porte bien son nom, mais qui manque un peu d’intensité, de maîtrise et de consistance par rapport au reste du EP.

Dommage aussi que les pièces s’achèvent souvent de manière un peu abrupte. Celles-ci auraient sûrement gagné à être mixées en fondus enchaînés, ceci afin de rendre le trip encore un peu plus immersif. Voilà donc un petit album expérimental loin d’être aride et plein de bonnes idées, qui on l’espère servira bientôt de base à une réalisation plus conséquente et ambitieuse. Quoi qu’il en soit, je vous engage à découvrir avec « Khaosan Road » l’une des nombreuses facettes de l’art de l’ami Franck Rakotonirina, musicien explorateur indépendant, à encourager et à soutenir.

Philippe Vallin (6,5/10)

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Pour écouter et télécharger l’album :

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