The John Irvine Band – Here Come The Robots!
Head In The Door Records
2025
Lucas Biela
The John Irvine Band – Here Come The Robots!
John Irvine est un compositeur, guitariste, bassiste et claviériste écossais. Ayant démarré sa carrière à l’aube des années 2010 sous le nom The John Irvine Band, il est très porté sur la mélodie. C’est essentiellement dans le rock progressif et le jazz-rock des années 70 que notre multi-instrumentiste pioche ses influences. Alors que ses premiers albums portaient la marque d’une fusion héritée d’Allan Holdsworth, les derniers se rapprochent sensiblement de la formule d’un ELP ou d’un UK. En effet, les claviers ont peu à peu pris le pas sur les guitares. La musique s’en trouve alors plus colorée.
Ainsi, avec « A Dream Of Utopia », on apprécie les paysages changeants à travers la fenêtre du train que l’on a pris. Avec un bel équilibre entre étalage pompier et épanchements modestes, les débuts du périple se montrent pourtant bien sobres. Mais au fur et à mesure que l’on avance, de nombreux éléments commencent à émailler l’atmosphère, comme des volutes amusées, des pas de danse détendus, des lasers scintillants… L’exploration s’avère alors des plus ébouriffantes avec toute cette profusion de sons qui nous plongent dans un maelstrom vertigineux. Plus surprenant, le chapitre « Coexistence Of Opposites » porte bien son nom puisqu’il nous fait passer de mondes arctiques aux banquises désertes et au mystère planant à des contrées exotiques marquées par des rythmes enjoués et une végétation aux couleurs éblouissantes. Le talent de John réside également dans cette capacité à mêler l’angoisse et l’espoir. Ainsi, quand la menace des robots se profile (« Here Come The Robots! »), les alertes tourbillonnantes nous inquiètent là où à l’inverse les marches allègres nous rassurent.
On assiste également à un passage de l’extraversion à l’introspection dans la suite en trois mouvements, « The End Of Days ». C’est notamment le cas dans ce miroir inversé que claviers et guitare traversent « au coucher du soleil ». Alors que les premiers bombent le torse et la deuxième pleure les larmes de son corps, c’est un revirement qui s’opère en plein milieu de la soirée. La mélancolie saisit alors les synthés tandis que la six-cordes se retrouve comblée de joie. En voilà un beau travail d’acrobate, nécessitant autant une certaine dextérité dans l’exécution qu’un esprit versatile. Bien qu’ils regardaient dans des directions opposées à la tombée de la nuit, c’est en revanche de concert que les éléments doivent travailler pour reprendre la « construction du dôme géodésique » au petit matin. Perplexité et plaintes sont alors partagées des deux côtés. Mais très vite, c’est un enthousiasme à tout-va qui prend le relais. Enfin, appelés pour monter la « cage aérienne », les compères qui se regardaient en chien de faïence avant d’unir leurs forces, traversent maintenant les épreuves à la sueur de leur front mais n’oublient pas de se jeter dans les bras l’un de l’autre une fois chaque étape du projet réalisée.
A l’aide de claviers magiques et de guitares tour à tour lumineuses et ombrageuses, John Irvine sait construire des scénarios riches en rebondissements. Grâce à la diversité et à la versatilité des notes qu’il en ressort, notre imagination n’en est que mieux stimulée. La mélodie est toujours en filigrane des aventures auxquelles nous prenons part. Elle joue par ailleurs le rôle de fil conducteur, permettant ainsi de nous orienter dans le labyrinthe des détails fourmillants. D’album en album, notre Ecossais ne cesse de peaufiner cet aspect de son langage musical. Le dernier en date, Here Come The Robots! en est à nouveau un bel exemple.