Marillion – Brave Live 2013
Marillion
Racket Records
En octobre 2013 vient de sortir, plus de quatorze ans après la parution de l’himalayesque et conceptuel album studio « Brave« , une somptueuse captation sonore du disque en concert, enregistrée le 9 mars dernier à Port Zélande en Hollande, à l’occasion du « Marillion Week-End » annuel. Disons le d’entrée, cette version de l’œuvre, souvent considérée comme le magnum opus des anglais (et indéniablement la plus sombre de leurs réalisations), est absolument monumentale. La captation, on n’insistera jamais suffisamment sur ce point, est ici quasiment parfaite. Réalisée avec pas moins de quinze caméras numériques qui restituent une image HD renversante de précision, celle-ci alterne avec brio plans fixes de chaque musicien (mais aussi vues d’ensemble fixes ou en mouvement, avec travellings aériens dans tous les sens), de manière équilibrée, souvent rapprochée. Les soli sont filmés au plus près et l’harmonie entre musique et filmage va très loin : sur « Goodbye To All That » par exemple, morceau dément par excellence, le montage se fait épileptique, mettant parfaitement en exergue la « folie » de Steve Hogarth, complètement habité du début à la fin du set. Les gros plans sur les visages et les instruments sont toujours pertinents, ce qui permet de profiter parfaitement du travail appliqué des musiciens, mais aussi de la complicité et de l’extrême cohérence qui règnent sur scène.
Qui plus est, la qualité sonore est absolument bluffante, avec un rendu aussi puissant que dynamique (quel mixage !) qui permet de vivre le show comme si on y était, sur tout équipement hi-fi digne de ce nom. La scénographie, non dénuée de surprises, reprend la trame du disque et les prestations en version intégrale dont il a fait l’objet par le passé, avec des performances d’anthologie de h sur « Runaway Girl », « Hard As Love », « Paper Lies » (où le chanteur fait un peu le « Barry William Show » de Peter Gabriel) et « The Great Escape », avec une émotion à son comble. L’ensemble est mis en valeur par un light show digne du grand Pink Floyd où rien n’est laissé au hasard, avec projections vidéo, effets stroboscopiques et lasers en pagaille. Moment jouissif que celui là, qui permet aux fans de retrouver un combo (nommé à fort juste titre « meilleur groupe de l’année 2013 » par l’excellent mensuel britannique Prog !) au faîte de sa forme et de son art. On se croirait revenus, les moyens techniques en plus, aux soirées des 28, 29 et 30 avril 1994, lors des trois gigs d’anthologie donnés par la formation à La Cigale à Paris.
Le gang d’Aylesbury fait la fête à ses aficionados, entraînant tout sur son passage avec une énergie dévastatrice et un spectacle aussi galvanisant qu’hypnotique dont il vous sera impossible de décrocher une seule seconde. Voici donc une belle claque pour tout le monde, et surtout pour ceux qui persistent à considérer le groupe comme mineur dans l’histoire du rock – les sots. Vous en connaissez beaucoup vous des combos qui débutent leur concert par un « morceau » d’une heure et quart ? Il faut un sacré culot pour déverser sur le public un tel torrent sans interruption, en se fiant seulement à la musique et à la force de son propos narratif pour créer l’ambiance et maintenir l’auditoire en haleine, sans jamais lasser.
Interprété en concert en 2013, « Brave » renforce encore un peu plus son aspect de diamant noir étincelant, incarnant à lui seul la beauté du désespoir et de la rage conjugués. Habité jusqu’à la lisière de la démence, Steve Hogarth fait preuve d’une générosité explosive et un rien provocatrice, entouré de ses quatre acolytes plus discrets, mais qui assurent eux aussi comme des bêtes, investis jusqu’au bouts des doigts dans la mise en musique d’un triste et troublant fait divers réincarné en concept-album. Il faudra attendre l’hymne acoustique « Made Again » pour quitter ce délicieux rêve agité en mode mineur, et retrouver un regain d’optimisme !
Les rappels, généreux et consistants, poursuivent dans cette voie plus légère, puisque s’enchaînent les pêchus « Rich » et the « The Damage », suivis de « Trap The Spark », « Warm Wet Circles », « Drilling Holes », « Out Of This World », « Seasons End » et « The Space », bizarrement transposé dans une tonalité plus basse, ce qui lui fait perdre un peu en intensité émotionnelle (h aurait-il eu des problèmes de voix en fin de soirée ? Mystère !). Comme c’est aussi le cas sur la version double DVD, le bluray comporte 4 titres bonus, avec « Hooks In You », « Cover My Eyes » et « Slainte Mhath », plus le film bouleversant de « Out Of This World ».
En revanche, le support HD, celui qui s’impose, est enrichi d’une version 5.1 de « River », longue plage ambient signée Michael Hunter (la musique ultra-planante d’introduction des gigs en 1994, épuisée hélas depuis belle lurette en CD). Vous pouvez oublier sans regret le « Brave Live » paru au seul format DVD en 2002, dont la médiocre qualité technique portait cruellement préjudice à la pourtant très bonne prestation du groupe. « Brave 2013 » est LA version scénique définitive de ce classique absolu signé Marillion. Juste indispensable !
Philippe Vallin & Bertrand Pourcheron (10/10)
J’hésitais à le prendre, mais s’il y a en plus une version HD de « River », je vais craquer, c’est sûr.
Il n’y a pas à hésiter si vous êtes fan, c’est vraiment du lourd, réalisé avec soin qui plus est 😉
Le bluray n’est pas donné c’est vrai, mais ça vaut le coup et le bonheur est au RV !
Oui, le bluray est, à tous points de vue, indispensable. « River », que de souvenirs….
Cordialement,
Bertrand
xx