Lisa Gerrard – Twilight Kingdom
Lisa Gerrard
Gerrard Records (version digitale uniquement)
Un nouvel album de Lisa Gerrard est toujours un événement tant cette artiste versatile sait nous transporter avec son timbre unique. Depuis ses débuts avec Dead Can Dance jusqu’à sa collaboration avec Klaus Schulze, c’est toujours elle qui a attiré l’attention des auditeurs. Curieusement, très peu d’informations ont filtré sur la sortie de son dernier opus, intitulé « Twilight Kingdom ». Mais, peu après, la grande dame l’a carrément mis en écoute intégrale sur son site ! C’est Philippe Vallin, co-fondateur de Clair & Obscur, qui m’a mis la puce à l’oreille. Fort de mon amour pour l’oeuvre de cette géniale musicienne, je me suis précipité sur les liens d’écoute en streaming pour découvrir une superbe collection mélodique qui s’annonçait sombre à la simple vue de la pochette. Avec ses envolées à fleur de peau, comme surgies d’un passé lointain (on pense souvent au chant byzantin ou aux lamentations de la Renaissance), Lisa Gerrard possède un timbre qui fait rejaillir à la surface de notre terre toutes les expériences accumulées au cours des millénaires. Elle sait nous émouvoir simplement par un usage inhabituel (pour le monde de la pop) et varié (on jurerait entendre plusieurs vocalistes avec des tessitures différentes) de son fascinant organe. La tendresse de son chant joue également un grand rôle en termes d’émotion.
Tout au long du disque, c’est en fait à une véritable séance de recueillement mystique et quasi-religieux qu’elle nous convie. Sur « Adrift » et « Neptune », on retrouve ce timbre grave et solennel qui nous rappelle son amour pour les chants sacrés du Moyen-Age. Quant aux très réussies vocalises angéliques qui accompagnent « Neptune » en arrière-plan, elles sont le fait d’Astrid Williamson. De toutes les pièces, « Estelita » et « Too Far Gone » sont cependant les plus surprenantes car on y entend notre déesse adulée évoluer dans un registre plus pop, mélancolique à souhait bien évidemment, mais avec de vraies paroles cette fois-ci (écrites, sur « Too Far Gone », par l’acteur Russel Crowe qu’on retrouvait dans « Gladiator », film dont Lisa Gerrard avait contribué à la trame sonore).
Sur le premier de ces deux titres (« Adrift »), la voix est assurée par le leader de Silverchair, Daniel Johns dans un registre rauque (imaginez un Seal épouvanté), s’octroyant toutefois des échappées vers les aigus qui, cette fois-ci, évoquent les moments les plus excentriques de Mika. Tandis que sur le second (« Too Far Gone »), c’est comme si l’artiste folk intimiste Marissa Nadler s’était invitée à la séance de recueillement. Avec cette profusion vocale, « Twilight Kingdom » possède décidément plus d’une corde à son arc ! Par ailleurs, les fort belles mélodies participent, bien entendu, également à la beauté de l’ensemble, avec leurs arrangements minimalistes mais somptueux (le compagnon de longue date de Lisa Gerrard, Patrick Cassidy, a été reconduit). Ceux-ci se font discrets quand le chant évolue dans le registre du recueillement et plus majestueux quand Lisa prend son envol.
Avec cet album majeur, Lisa Gerrard a rassemblé des pièces qui mettent en lumière son extraordinaire organe (ainsi que celui de ses deux invités, Astrid Williamson et Daniel Johns, tous deux dans un registre très différent de leur habitude), l’accompagnement musical restant le moins envahissant possible. Il s’agit là d’une de ses oeuvres à la fois la plus sombre au niveau atmosphérique et la plus personnelle par l’accent porté sur les vocaux. A l’image de ces chants qui l’ont inspirée, cette sublime création restera, espérons-le, intemporelle.
Lucas Biela (10/10)
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y a-t-il moyen de trouver une version album CD quelque part ?