John Carpenter – Lost Themes
John Carpenter
Sacred Bones Records
Comment écrire une critique sur « the Big John » Carpenter quand on est un fan absolu ? Il est évident qu’il faut d’abord régler cette question d’ordre psychanalytique, faire son analyse, « tuer le père » pour enfin se recentrer sur l’essentiel et avoir le nécessaire recul sur soi …… Bon ! Je ne suis pas passé sur ce canapé et après tout, Carpenter n’est pas obligatoirement infaillible. En même temps, c’est aussi un peu comme si vous vouliez vous acharner contre ce petit artisan du coin, maître de son art, appliqué, indépendant voire rebelle, se débattant contre les grosses « machines » souhaitant sa disparition. Allez, je me lance ! John Carpenter, ai-je besoin de le présenter ?! Cet immense réalisateur et producteur indépendant (aussi bien qu’on puisse l’être sous le rouleau compresseur hollywoodien ), maître incontesté du film du genre, son cinéma fut si décrié en son temps comme beaucoup d’autres, cible de la critique « bien pensante »… Et quelques paires d’années plus tard, notre bonhomme se retrouve au programme de toutes les plus grandes écoles de cinéma d’Hollywood et d’ailleurs (quand on eu découvert, bien entendu, que le cinéma de « genre », considéré comme mineur, devenait très « bankable » !). Total artisan de son Art, par obligation mais aussi par choix (oui je sais, c’est contradictoire !).
Bon, il est vrai que Big John n’a jamais caché sa passion pour la musique, partie indéniablement indissociable de son cinéma dont il en est le compositeur exclusif, par manque de moyen certes, mais surtout par amour de la musique. A l’exception de projets dits « de studio » ou de commandes comme The thing dont la bande originale a été confiée à cet autre maestro, Ennio Morricone. Bon, ne nous dissipons plus et parlons de l’essentiel, à savoir John Carpenter « Lost Themes ». Quand les premiers bruits ont parlé d’un album de Carpenter, je me suis dit, hourra ! Un prochain film sur les rails, enfin son retour tant attendu pour les fans comme moi ! Et puis non. On nous parle d’un album musical exclusivement. Ce n’est pas grave, il est donc vivant et avec des projets, même si je n’en doutais pas, sachant qu’il venait de sortir un « comics book » (comme ils disent là-bas !) dont il est le scénariste. Alors sûrement, une énième compile de ses bandes originales ? Même pas !
Il s’agit donc bien ici d’un album aux compositions originales n’ayant pour objectifs que d’être écoutées sans autre support que votre imagination. Assisté par Cody Carpenter et Daniel Davies, l’album « Lost Themes » est sorti sur le label Sacred Bones. Ce même label avait déjà offert la possibilité à David Lynch, autre réalisateur à l’univers très personnel, de publier l’album ”The Big Dream” en 2013 et de rééditer les BO des films Twin Peaks et Eraserhead. C’est donc une première pour John Carpenter, exister en compositeur et musicien uniquement, en tant que tel. Il faut être au fait que l’artiste ne sait ni lire ni écrire la musique, et que celui-ci joue à l’instinct. Alors autant le dire tout de suite, à la première écoute, rien de surprenant : nous sommes bien dans ce qu’il sait faire et ce qu’il maîtrise. Mais ici, la musique ne peut se cacher derrière des images, de longues plages de synthétiseurs immédiatement reconnaissables, la répétitivité des boucles en faisant sa marque de fabrique.
Ne vous attendez pas non plus à une musique plus « festive » qu’à l’accoutumée, nous sommes toujours ici plongés dans une ambiance froide et minimaliste. Alors doit on être déçu ?! Nous aurions pu nous attendre, pour ce premier album qui ne propose que de la musique inédite, à quelque chose de différent, un autre John, peut être plus personnel, racontant son histoire, ou alors à des morceaux aux orchestrations plus fournies. En découvrant la pochette de l’album, pleine de noirceur et montée comme une affiche de film, il est clair que la volonté du maestro n’était pas de vouloir sortir de son univers, de son art, ou de sa vision du monde, même si l’homme apparaît en photo sur la cover. John ne se raconte pas, il raconte sa vision des autres et de ce qui l’entoure.
Ce postulat posé, même s’il est sans surprise, l’album ne peut déplaire aux fans qui y trouverons certainement matière à aller au delà de la musique, dans les mondes cinématiques de Big John. Nous y trouverons même l’intérêt d’imaginer les différents scénarios cinématographiques qui pourraient accompagner ces nappes musicales. Pour les autres, malgré l’âge du créateur, la musique reste dans son temps, un style électro minimaliste mâtiné de rock instrumental toujours inspiré du son analogique des 80’s, que chacun pourra ranger à sa convenance.
On pourrait s’aventurer à vouloir y associer d’autres artistes, à y voir des ressemblances ou des inspirations, mais c’est du John Carpenter pur jus, comme il sait le faire depuis des décennies.
David (Baba O’Riley) Malin (7/10)
http://johncarpenter.sacredbonesrecords.com/
http://www.theofficialjohncarpenter.com/
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Une chronique extrêmement precise.Belle maîtrise du sujet,un petit détail tout de même… John EST infaillible
Et David « Big Fan » Malin qui arrive à rester objectif avec Big John, putain je suis sans voix !!!! :-p