Bob Dylan – Shadows In The Night
Bob Dylan
Columbia
Fortement critiqué pour ses prestations vocales lors de ses récentes tournées, Bob Dylan nous offre cette année un album… de reprises de standards américains ! Le Zim s’adonne cette-fois ci à un exercice usuellement réservé aux crooners et vocalistes du genre. L’éternel outsider répondrait-il à un public en plein déni de vieillesse ? Il est à noter que la promotion de l’album s’est faite via une seule interview accordée au magazine AARP (Association américaine des personnes retraités) qui s’adresse à plus de 40 millions d’américains qui ont passé la barre des 50 ans. Et 50 000 lecteurs choisis au hasard auront même eu la chance de recevoir leur magazine accompagné d’un exemplaire gratuit de l’album. C’est un fait, le corps vieillit et la voix aussi mais, à 73 ans, le Barde a le mérite de chanter en live et non en play-back comme de nombreux « artistes » qui ont parfois moins de trois fois son âge. Avec ces dix titres, c’est un album apaisé qu’il nous propose. Des arrangements simples (pedal steel, guitares, basse et quelques cuivres), des tempos ralentis et des accords mineurs. L’ordre des chansons est celui de leur enregistrement, en direct, en une ou deux prises. Rien que ça s’il vous plaît !
Tous les morceaux de « Shadows In The Night » ont le point commun d’avoir été interprétées par le mythique Frank Sinatra. Mais loin des envolées majestueuses de The Voice (je ne parle pas d’un certain programme télévisuel où des alchimistes corrompus transforment l’espoir et l’admiration de jeunes chanteurs/miauleurs – rayez la mention inutile – en espèces sonnantes et trébuchantes), c’est en toute simplicité et avec classe que Dylan nous offre ces classiques maintes fois repris et souvent dénaturés.
Rien qu’à l’écoute de « Some Enchanted Evening » ou de « Where Are You ? », vous vous imaginez marcher paisiblement, main dans la main, avec votre bien-aimée un soir d’été le long de la plage, veste sur l’épaule, ou bien siroter un martini dans un petit club de jazz new-yorkais à l’ambiance confinée et à la lumière tamisée. Alors oui, parfois, la voix de Dylan s’écarte de la justesse et certaines intonations vous font penser au célèbre chanteur des Pogues Shane MacGowan, mais le cœur et le talent sont là, c’est indéniable.
Le protégé de Johnny Cash avait déjà sorti un album de reprises en 1970, « Self Portrait », dans le but, dit-on, de rompre avec son rôle de porte parole contestataire et de gagner la liberté d’écrire des chansons plus personnelles. La transition ne fut pas sans douleur pour le public et pour le Bob. Cette fois-ci, c’est tranquillement que Bob Dylan endosse encore un nouveau rôle qui lui va bien ; celui du grand-père plein de sagesse et de bienveillance.
Mais rassurez vous, il n’a rien perdu de sa ferveur et de son engagement, car dans son entretien à l’AARP, il interpelle les riches Américains à tout faire pour créer des emplois : « Le gouvernement ne vas pas créer d’emplois. Il n’en a pas besoin. La population doit créer des emplois, et ces gros milliardaires sont ceux qui peuvent le faire« . Et avec la gigantesque tournée qui s’annonce, charité bien ordonnée commence par soi-même.
Pascal Sain (8/10)
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J’aime beaucoup Dylan, mais là, pour moi c’est son plus mauvais album … Malheureusement.