Aisles – 4:45 am
Aisles
Presagio Records
Groupe de rock progressif originaire du Chili, Aisles sort avec “4:45 am” son troisième album en 9 ans. Les frères Vergara – Sebastián (chant) et Germán (guitare et claviers) – sont toujours aux commandes, accompagnés par Felipe Candia (batterie et percussions), Rodrigo Sepúlveda (guitare, chant d’accompagnement), Alejandro Meléndez (claviers) et Daniel Baird-Kerr (basse). Avec nos chiliens, on est loin des excès du genre. Les voix sont touchantes (on pense souvent à Martyn Bates des mythiques Eyeless In Gaza), et les choeurs fleurent bon l’innocence et la fragilité de la new wave. C’est d’ailleurs cette même new wave que l’on retrouve dans les synthés scintillants de « Shallow And Daft ». Les instruments savent être humbles et participer de l’effort collectif, loin d’un nombrilisme qui n’intéresse personne, comme sur « Gallarda Yarura », cette gaillarde (danse de la Renaissance) pleine de fantaisie. Sur les ballades « Back My Strength » et « Sorrow », la voix prend son élan dans des chœurs de toute beauté, soutenue par un accompagnement plaintif. Tandis que sur l’émouvante pièce acoustique « The Sacrifice » et le versatile « Melancholia », tour à tour pensif et dansant, le même organe montre un côté plus déchiré, tout autant riche en émotions.
Encore une fois, le pont instrumental de « Back my strength » fait fi de toute démonstration futile, s’attachant à mettre en valeur les qualités mélodiques du morceau. Il en va de même de la pièce instrumentale « Hero » dont les claviers contribuent à créer des ambiances inquiétantes, là où le final en mode solennel cherche à rendre hommage a ce héros qui lui donne son nom. On sera néanmoins surpris par l’espèce d’exercice d’évacuation cosmique “Intermission », avec sa sirène obsédante. Et cependant, sa guitare aérienne, sa rythmique pulsatile et ses cymbales bozziennes font corps à merveille avec les ambiances soyeuses de l’oeuvre.
Notons de très belles parties de guitare acoustique de-ci, de-là, comme sur la ballade solaire « Sorrow » évoquée précédemment et la délicate pièce d’inspiration amérindienne et élisabéthaine « The Sacrifice », également mentionnée avant. De même quelques percussions éparses, non loin de l’approche fourmillante de l' »Exotica » d’un Martin Denny, ajoutent une touche de majesté luxuriante à l’ensemble déjà fort élégant par ailleurs.
S’affranchissant de toute limite et forts d’une musicalité résolument tournée vers les ambiances pensives et mélodiques, les musiciens de Aisles tissent avec beaucoup d’humilité et d’élégance un canevas éclectique de toute beauté. C’est une démarche qu’il faut saluer et encourager, tant elle est rare dans le milieu du rock progressif.
Lucas Biela (9/10)
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