Humana Prog – Fiori, Frutti, Farfalle

Si jamais un jour, par un vaste caprice espace-temps, une gaillarde troupe de ménestrels s’échappait du moyen-âge et venait rejoindre notre époque, elle jouerait certainement une musique très proche de celle amoureusement concoctée par Humana Prog. Il faut en effet souligner que ces musiciens italiens, au sujet desquels on ne dispose malheureusement d’aucun renseignement fiable, ont à l’évidence baigné dans le folklore local et que cette influence, désormais parfaitement assimilée, imprègne profondément leur musique, que ce soit dans le cadre de la suite éponyme de vingt minutes qui ouvre majestueusement l’album ou dans celui de pièces plus concises comme « Nel Prato Piu Verde » ou « La Balatta Degli Amici Perduti ». Ce qui caractérise la magie de cette formation surgie de nulle part c’est sa pureté mélodique. Le combo possède en effet un sens magique de la mélopée subtile, fine et aérienne et développe, avec une étonnante constance, une espèce de jubilation sereine qui charme l’oreille du début à la fin. On pourra évoquer, à titre de comparaison, le sublime « Rings Of Earthly Light » de leurs compatriotes d’Eris Pluvia, publié en octobre 1991 par Musea. Il n’y a pas de place pour la moindre dissonance dans cet ensemble où règne l’harmonie des sons et qui se hisse souvent à la hauteur des plus belles œuvres enfantées par Le Orme (« Felona E Sorona ») ou PFM (« Per Un Amico ») durant les golden seventies. Toutefois, cette subtilité harmonique ne repose en aucun cas sur une espèce de facilité instrumentale. Bien au contraire, les arrangements font preuve d’une extrême richesse et tout est fait pour mettre en valeur des atmosphères oniriques à souhait. Guitare acoustique, flûte pastorale, violon mélancolique et claviers analogiques reposent sur une rythmique aérienne qui se fait discrète pour mieux épouser les contours des sept compositions gravées sur cet opus détonant. C’est là-dessus que le chanteur, évoquant par instants le grand Aldo Taglapietra (ex Le Orme), déroule son tapis de poésie nébuleuse d’où transparaît une bucolique angoisse existentielle que chacun interprétera à sa façon. « Fiori, Frutti, Farfalle » conjugue au final, avec un rare bonheur, richesse et pureté : un îlot de sérénité (malgré quelques poussées de fièvre électrique de-ci de-là) au milieu du tumulte ambiant.