Hollywood Monsters – Capture The Sun : interview et chronique
Deadline Music
2016
Hollywood Monsters : Time to « Capture The Sun »!
Hollywood Monsters, le projet du guitariste-chanteur français Steph Honde, revient avec un nouvel album, Capture The Sun, encore plus ambitieux que le précédent, Big Trouble, sorti en 2014 chez Mausoleum Records. C’était l’occasion pour Clair & Obscur d’aller lui poser quelques questions au cœur des multiples projets que Steph est en train de réaliser entre France, Angleterre et États-Unis. Dans le même temps, nous vous invitons à découvrir son nouvel album et ses mystères. Mais pour commencer, la parole est à Steph Honde…
C&O : Bonjour, Steph. Et merci d’accorder un peu de ton temps à Clair & Obscur pour répondre à nos questions.
SH : Salut à toi, mon ami.
C&O : Capture The Sun est le deuxième album de Hollywood Monsters. Comment analyses-tu le chemin parcouru depuis que l’idée folle de créer ce groupe a germé dans ton esprit ?
SH : J’essaie de ne pas analyser justement car ça ne m’a jamais réussi (sourire). Je fais de la musique comme je le sens et sans concession. Ce que je peux dire, c’est que ce projet m’a demandé beaucoup de travail, mais m’a fait reconnaître de mes pairs (ce qui n’est pas rien à mes yeux).
C&O : Le groupe ressemble en fait à une nébuleuse d’artistes qui interviennent selon les affinités et sans doute les disponibilités. Vinnie Appice et Tim Bogert sont toujours là depuis Big Trouble. Comme cela se passe pour organiser tout ça ?
SH : Ça demande énormément de préparation et de rigueur. Tout se fait par internet, ce qui veut dire qu’il faut que j’enregistre une première version de l’album avec moi jouant de tous les instruments, et ensuite j’envoie les morceaux à chaque musicien en enlevant la partie qu’il doit enregistrer. Chose importante : je les laisse libres de jouer ce qu’ils veulent. Une fois leurs parties enregistrées, je réenregistre les miennes pour coller à ce qu’ils ont fait et sonner le plus live possible.
C&O : Sur Capture The Sun, tu as pratiquement tout pris en main, de l’enregistrement au mixage, en passant par la production. C’est un choix délibéré ? La volonté de contrôler l’ensemble du processus musical ? Le fait que tu n’aies pas trouvé un producteur avec qui travailler ? Une simple réalité économique ?
SH : Très franchement, c’est parce que j’en ai assez de dépendre des autres. C’est infernal, j’en ai eu assez d’attendre après les autres donc je me suis dis que je pouvais essayer de tout faire moi-même… du coup, je n’ai pas trop dormi pendant plusieurs mois, c’était énormément de travail mais je suis fier du résultat.
C&O : Les titres de l’album sont variés mais on sent quand même une unité thématique que l’on trouvait déjà sur le précédent. Sans être totalement conceptuel, Capture The Sun me semble articulé de manière intentionnelle, avec des clins d’œil appuyés à George Orwell et David Bowie. Pourrais-tu expliquer à nos lecteurs le pourquoi de ces inspirations ?
SH : Il y a un thème principal, celui du mal-être de notre société. Il n’y a pas d’histoire mais juste ce fil conducteur. Je me suis aussi beaucoup inspiré de mes propres expériences, il y a énormément de moi dans cet album. Rien n’est laissé au hasard, même les bruits ou les dialogues qu’on entend en fond parfois. L’album parle de notre société de consommation, de notre illusion de liberté, de politique avec « It’s A Lie », des enfants cloués devant l’ordi avec « Dreams » et des réseaux sociaux avec « King For a Day », de l’esclavagisme moderne avec « Evilution », etc. « Sweet Thing » est un morceau de Bowie écrit autour de 1984 (tout Diamond Dogs d’ailleurs), donc ça me semblait logique de l’incorporer dans l’album mais aussi de lui rendre hommage.
C&O : Est-ce que l’on peut s’attendre à une suite, qui intégrerait la même logique et peut-être un « Another Day In Grey – Part 3 » ?
SH : Absolument ! Il y aura un « King For A Day – Part II », le troisième album est déjà composé. Je l’ai composé en même temps que celui-ci. J’aime l’idée de continuité conceptuelle qui était chère à Zappa. Tout n’est qu’un grand récit.
C&O : En attendant, tu viens de sortir un album de reprises sévèrement burnées (de Saxon et Iron Maiden, à Danzig et Nazareth, en passant par The Misfits et The Ramones), que l’on trouve en version digitale via CD Baby. Est-ce un projet intermédiaire à Hollywood Monsters ? Un retour aux sources ? Qui joue avec toi sur cet album ?
SH : C’est une pause. Justement, j’y joue de tous les instruments. J’avais besoin de ce retour aux sources, oui. Je l’ai principalement fait pour le fun, ça me change des albums où je me creuse la tête, ha ha ! Je pense que les gens vont bien aimer cet album, il est rock’n’roll. Ça m’a permis de chanter et jouer autrement.
C&O : Je ne suis pas sans savoir que tu as également d’autres projets, avec Paul Di’Anno ou Darren Crisp, par exemple. Pourrais-tu nous en dire quelques mots ?
SH : J’ai un projet d’album de punk avec Paul Di’Anno, j’ai écrit 10 morceaux. J’espère que ça aboutira. Avec Darren, on a commencé à enregistrer des compos sous le nom de groupe Age Of Liberty. Darren est quelqu’un de très motivé, positif, c’est un battant, j’aime beaucoup ça. Je pense qu’on avancera beaucoup plus quand je serai rentré aux États-Unis.
C&O : On te connaissait excellent guitariste dans les projets auxquels tu as participé (Café Bertrand, The Stars, Paul Di’Anno). On découvre d’autres facettes avec Hollywood Monsters : le compositeur bien entendu, mais aussi un excellent chanteur, un claviériste doué, ou encore un bassiste intéressant. Aujourd’hui, qu’est-ce qui te semble le plus important, le rôle qui te semble essentiel ?
SH : Difficile de répondre… Je pense que la composition est le plus important (je compose pratiquement tout au piano). En revanche, je me sens de plus en plus chanteur. Je découvre pleins de facettes différentes avec ma voix et je pense que ça va s’entendre sur l’album de reprises justement.
C&O : Comme guitariste, tu démontres des capacités d’adaptation dans beaucoup de styles, les deux albums de Hollywood Monsters le démontrent à l’envi, bien entendu, mais aussi des participations extérieures comme sur le titre « Aktion T4 » de l’album de Grandval (merci encore, d’ailleurs, tu m’as vraiment bluffé sur ce morceau). Comment te définirais-tu comme guitariste et quelles sont tes principales influences ?
SH : Je me définis comme guitariste-pianiste, ha ha ! Je construis mes accords comme pour le piano. J’utilise très peu de power chords, il a toujours des cordes à vide dans mes accords pour remplir l’espace. Je ne suis pas (étrangement) un fan de guitares, je vois cet instrument comme un moyen de m’exprimer et c’est avec la guitare que j’ai le plus de facilités. Mes influences sont David Gilmour, Jeff Beck, Frank Zappa, Pete Townshend. Bizarrement, du point de vue instrumental, je serais plutôt influencé par des batteurs comme Phil Collins, Terry Bozzio, Vinnie Appice, Keith Moon, Ian Paice, Nick Mason…
C&O : De la même manière, les albums de Hollywood Monsters sont entre Steve Hillage et Glenn Hughes dans ma cédéthèque. Sans vouloir te mettre dans une case, quels sont les artistes dont tu te sens le plus proche avec ce monstrueux projet ?
SH : Je me sens proche de Bowie dans le fait de vouloir toujours progresser et prendre des risques. Je me sens proche de Genesis, Marillion mais aussi Opeth, Pink Floyd… majoritairement du prog.
C&O : Maintenant qu’il y a deux albums réalisés et plusieurs autres projets en cours, on attend avec impatience de voir et d’entendre Hollywood Monsters sur scène. Peux-tu nous donner un peu d’espoir pour les temps qui viennent ? As-tu une petite idée des musiciens qui pourraient t’accompagner sur scène ?
SH : Je pense que ce sera possible une fois de retour aux États-Unis, avec très certainement Vinny Appice et Rudy Sarzo (NDLR : le monstrueux bassiste connu pour ses participations à Quiet Riot, Dio, Whitesnake et Ozzy Osbourne). Musicalement, les choses sont très compliquées en France malheureusement…
C&O : Eh bien merci, Steph, et longue vie à Hollywood Monsters. Keep on rockin’!
SH : Merci, et à bientôt pour de nouveaux albums !
Propos recueillis par Henri Vaugrand.
Capture The Sun : la chronique
Après un premier album fort réussi sorti en 2014 chez Mausoleum Records, et dont j’avais pu vanter les mérites dans d’autres colonnes (Big Trouble), le projet mené par Steph Honde revient avec Capture The Sun et un nouveau deal chez Deadline Music, une division de Cleopatra Records à Los Angeles. Encore une fois, le fidèle second pilier du projet, rien moins que Vinnie Appice, est derrière les fûts sur la majeure partie des titres, et la légende Tim Bogert pose sa basse sur un morceau. Si Steph Honde assure la plus grande partie du travail – voix, guitares, basse, claviers, composition, enregistrement, mixage et production –, il s’est encore une fois entouré d’une brochette d’artistes – voir la liste ci-dessous – qui méritent le respect (ce qui prouve aussi la considération que Steph peut avoir dans le milieu). Bien entendu, s’entourer d’une pléiade d’artistes reconnus n’a jamais assuré en soi la qualité d’un album. Mais Steph Honde sait amener ses invités à donner le meilleur d’eux-mêmes là où il les attend. Et pour franchir l’écueil tant redouté du deuxième album, c’est un pari essentiel remporté haut-la-main par notre Manosquin. On sait, par ailleurs (enfin, moi je sais, après vous n’avez qu’à vous renseigner au lieu de toujours attendre que l’on vous explique tout, non mais !), que Steph est tiraillé entre plusieurs styles musicaux depuis fort longtemps. Que ce soit le hard rock le plus velu – tirant même parfois vers le punk lorsqu’il est la gâchette de Paul Di’Anno –, le progressif le plus classique et grandiloquent ou l’art rock le plus entendu – ses différents hommages à David Bowie en attestent –, l’ami Steph fait feu de tout bois. Eh bien, avec Capture The Sun, il joue de tous les registres, le côté brutal en moins, lui préférant parfois une tendance plus catchy qui, à mon humble avis, lui sied mieux. Entrons donc dans la cage pour mieux appréhender ce deuxième album des monstres hollywoodiens.
Je dis « la cage » en raison de cette représentation d’un soleil enfermé qui illustre la couverture. Chacun aura son avis sur l’artwork de l’album et sur cette pochette. Personnellement, je ne suis pas emballé… Il semble également que la maison de disques n’ait pas mis les moyens nécessaires dans le domaine artistique avec un simple boitier cristal et un livret 4 pages réduit à sa plus simple expression. On aurait bien aimé avoir les paroles des chansons pour mieux entrer dans le monde un peu sombre et torturé de Steph Honde. Car si l’on veut bien prêter attention aux ambiances et aux mots des onze titres originaux qui composent l’ossature de l’album, on sent une rage sourdre sous les pulsations et les développements : Steph Honde a des comptes à régler avec un monde dont il n’aime pas certains aspects, et peut-être même certaines personnes (et de ce point de vue, les reprises enfoncent un peu plus le clou). Les reprises, justement, je vais en parler un peu avant de m’intéresser aux compositions de notre héros du jour (vous allez comprendre le clin d’œil). D’abord, il y a un titre bonus : le « Fool For Your Loving » de Whitesnake ! On sait (eh oui, encore !) l’admiration que Steph porte à David Coverdale, d’autant que sa voix peut être très ressemblante à celle du Serpent Blanc. La version proposée est plus proche de l’original de 1980 (Ready An’ Willing) que de la version peroxydée de 1989 (Slip Of The Tongue), et c’est tant mieux. Steph y réalise tout avec le seul appui d’Eric Lebailly à la batterie (ancien de l’excellent groupe Adagio entre autres). Ma foi, la version est plaisante, sans apporter de réelles nouveautés, juste la vérification que cet univers colle bien à Steph Honde (sa voix, sa guitare et un très bon jeu de basse), qu’il y a peut-être un message subliminal dans cette reprise (mais là, j’extrapole sûrement), et que Lebailly est décidément un excellent batteur ! Et puis, il y a l’attaque d’un monument inattendu, le triptyque « Sweet Thing / Candidate / Sweet Thing Reprise » de David Bowie. On se souvient (ceux qui ne suivent pas, prenez des notes !) que Steph Honde avait rassemblé une ribambelle d’artistes après les attentats de Paris de novembre 2015 (voir ici et là) pour interpréter « Heroes » et récolter des fonds pour aider les victimes et leurs familles. Cette fois-ci, c’est à la suite contenue dans le Diamond Dogs de 1974 que Steph se confronte. Cet ensemble de trois petites pièces est un des plus sombres et désespérés écrits par Bowie, mais aussi celui où sa voix se fait la plus basse, notamment au début. Si l’on considère que c’est ce triptyque qui clôt véritablement l’album de Hollywood Monsters, il prend tout son sens par rapport aux refrains redondants sur un espoir bon marché et futile… Musicalement, s’il n’y a ni le saxophone de Bowie ni le piano foldingue de Mike Garson, les guitares de Steph Honde illuminent le titre et son chant, sans comparaison avec celui du Thin White Duke, nous fait entrer de plain-pied dans le désespoir du texte (on imagine même Steph enregistrant dans la même ambiance sombre et tamisée que Bowie et ses musiciens de l’époque). En tout cas, une réussite, partie intégrante de l’album qu’il ne faut pas voir comme une simple reprise, mais plutôt comme une appropriation-digestion-sublimation toute personnelle.
Car c’est bien la surprise la plus importante de cet album. Sous couvert de nombreux titres et d’une affiliation à un monde du rock plutôt festif et prompt à distiller de sérieux problèmes de cervicales, Capture The Sun se révèle un disque pas loin d’être conceptuel et terriblement marqué par son époque. Et même si l’on peut trouver une certaine parenté et continuité avec Big Trouble (notamment avec les titres « Another Day In Grey – Part I », « Oh Boy! » ou « Village Of The Damned »), ce nouvel opus enfonce le clou. La rage et l’espoir étaient déjà les deux pendants du premier album, le second sentiment paraissant légèrement majoritaire à un moment où Steph Honde voyait son projet de rêve américain prendre forme. Avec Capture The Sun, une certaine désillusion (pas musicale, mais plutôt sociétale) semble prédominer. Et l’introduction de l’album, « Mysteries Of Life » avec ses voix entremêlées, dont celle de George Orwell, ses cris et ses bruits de déflagrations ne laisse aucun doute sur l’ambiance et la descendance : c’est bien vers 1984 et Diamond Dogs qu’il faut se tourner. Vinnie Appice nous gratifie d’un de ses roulements dont il a le secret pour lancer « Evilution », un brulot hard rock enlevé sur lequel se mêlent les voix de Steph et de Darren Crisp, un chanteur dont je vous conseille vivement d’aller voir et entendre la musique. La basse de Neil Murray (non, vous ne rêvez pas !) gronde, les voix sont hargneuses, le titre bastonne (c’est celui qui a le côté le plus punk, on aurait d’ailleurs pu y entendre Paul Di’Anno éructer avec plaisir…). Les soli (Tracy G. en premier) se déchaînent et sans coup férir le titre s’éteint dans les braises après un « One day we all go down » cataclysmique… Comment ne pas voir l’analogie qui suit avec le morceau au titre quasi identique et au texte très proche de celui du Low de David Bowie. « Always Crashing The Same Car » et son intro hendrixienne est porté par la basse de Pascal Mulot (Satan Jokers). Ce mid-tempo lourd, au refrain et au riff martelés, est véritablement éructé par Steph Honde, avant que celui-ci ne délivre un long solo bourré de feeling et ne revienne nous pilonner de l’inéluctabilité : « I’m driving down as far as I can / And I’m crashing ». La fin du titre est joliment troussée avec les doigts de Steph qui vont chercher les notes les plus hautes possibles sur sa guitare : jouissif. Mais la jouissance ne fait que s’activer avec le titre que je préfère sur l’album. Si « It’s A Lie » est catchy, ses sonorités modernes sont portées par la basse de Tim Bogert et un redoutable trio vocal : Steph, bien entendu, mais aussi Danko Jones et l’inattendue Jenny Haan (oui, oui, la fabuleuse chanteuse de Babe Ruth pour ceux qui s’en souviennent). Ce mensonge, c’est celui de la politique en général, mais comme il est adossé à un riff plutôt joyeux, on oublie vite son acidité. C’est un peu comme TenCC et son « I’m Not In Love » (on peut d’ailleurs aussi interpréter le morceau comme celui d’un certain dégoût amoureux), les plus inattentifs ne remarqueront pas le côté obscur et headbangeront dans leur voiture ou gueuleront sous la douche la bouteille de shampoing en guise de micro ! Punaise, écoutez bien la ligne de basse de maître Bogert et le solo enflammé de Steph, et laissez-vous emporter par le refrain : « It’s a crying shame / It’s a foolish game / It’s a lie », les échanges Steph-Jenny, et la ponctuation finale de Danko : « It’s a God damn lie ». Si vous avez quelques rancœurs envers la classe politique – ou un(e) ex-petit(e) ami(e) –, vous comprendrez aisément quel plaisir paradoxal on peut avoir à adorer ce titre court que les radios (enfin, celles qui ont des programmateurs avec un cerveau un tantinet musical entre les oreilles) vont bien être obligées de considérer comme un tube tube (il n’y a qu’à voir et écouter le clip dantesque réalisé par Cédric Guion pour KS Production que nous vous proposons ci-dessous) ! « Waiting » permet de dévoiler un Honde crooner, bluesy et plutôt West Coast. Ce low-tempo s’étire sur des guitares où se mêlent les références à JJ Cale et David Gilmour, les claviers d’Alessandro Bertoni (le prodige italien dont l’excellent Keystone a été chroniqué dans nos colonnes) et un refrain très stonien. Un titre hybride qui semble effeuiller le dépit amoureux, mais commence à instiller l’espoir… « Don’t Let It Happen », instrumental floydien distille une belle partie de piano de Steph Honde et des notes de guitare gilmouriennes à souhait sur fond d’extraits des voix de l’acteur Vincent Price (sur l’incroyable spécificité de l’espèce humaine à s’autodétruire par millions, notamment au XXe siècle) et à nouveau de George Orwell que l’on se rappellera, malade et alité, décrivant le monde qui vient, fixant soudainement la caméra de la BBC pour lancer son dernier avertissement : « Don’t let it happen, it depends on you », qui conclut le morceau. Et justement, le virage s’amorce avec « Another Day In Grey Part II », sorte de coda à la première partie qui introduisait Big Trouble. Il est à nouveau question de départ, de renouveau, de cette nécessité de sortir d’une zone grise, entre un précipice et une nouvelle route à prendre… Musicalement, on revient au style catchy et très américain qui donne le meilleur chez Steph Honde, une superbe composition avec de beaux riffs, des ponts réussis et un refrain qui vous vrille la cervelle ! Et cela continue avec « Everything Is Gonna Be Alright », un autre mid-tempo rempli de petites finesses rythmiques (écoutes le passage à partir de 1:12). Les guitares se croisent un peu partout, Vinny Appice distille les breaks et les roulements : Everything IS alright. Honde se fait tendre avec une co-composition, le type de morceau toujours présent sur les disques de hard. La voix se pose tout en retenue, ce qui montre une fois de plus les capacités vocales et le registre de l’animal, et tous les canons du genre sont respectés. « Dreams » vous rentre dans le crâne sans crier gare avec, là encore, un sens caché derrière l’aspect satiné : il est question d’enfants obnubilés par les écrans en tout genre. Encore un low-tempo avec « King For A Day », et le Suédois Andreas Johansson (Royal Hunt, Narnia) derrière les fûts, le texte renvoyant, pour les réseaux sociaux, au quart d’heure de gloire cher à Andy Warhol. Le titre est joliment agrémenté d’un orgue, de jolis chœurs, et d’un solo gorgé de feeling. Sans conclure l’album, « Capture The Sun », coécrit par Darren Crisp et Craig Goldy (oui, oui, le guitariste de Dio, entre autres), voit à nouveau un trio vocal Honde-Crisp-Haan, la rythmique de Goldy et la basse de Tony Franklin (un bassiste vraiment hors norme), et est produit pas Darren Crisp (avec un traitement original du clavier sur certains passages, écoutez à partir de 3:04). Le riff goldien est une merveille qui fait groover le titre comme il n’est pas permis. Ensuite, ce sont les covers dont j’ai déjà parlé au début (si vous avez oublié, il serait peut-être temps de consulter, non ?).
Capture The Sun est un album ambitieux qui poursuit de belle manière le chantier hollywoodien entrepris avec Big Trouble. Si ce n’est un mastering qui me semble écraser un peu la dynamique de l’album, la production est fine, bourrée de ces petits détails que l’on se plaît à découvrir au fil des écoutes. Car au lieu d’être une simple collection de bonnes chansons rock qui accrochent, ce deuxième opus des Hollywood Monsters nous offre une introspection rythmée qu’il est nécessaire de s’approprier comme un bon vin. On ne doute pas que le prochain album fouillera encore plus dans les méandres sombres de l’esprit de Steph Honde tout comme dans ses fulgurances lumineuses. En attendant de voir enfin un vrai groupe interpréter ces deux albums sur scène – ce qui devrait bien finir par arriver tellement la demande semble exister –, vous pouvez vous précipiter sur Capture The Sun, sans aucune peur de vous brûler les ailes, mais avec l’énergie de la flamme étincelante dont l’album regorge.
Henri Vaugrand