BySenses – Frigments/Fragments

Frigments/Fragments
BySenses
2014
Autoproduction

Bysenses Frigments Fragments

La Belgique a toujours été une des grandes nations de la musique électronique. Impossible de ne pas citer dans ce cas-là Telex ou Front 242, ces deux groupes ayant eu tellement d’influence et de continuateurs. Cependant, il manquait un ou deux dignes représentants belges de la Berlin School allemande initiée dans les années 70 par Tangerine Dream, Klaus Schulze, Michael Hoenig, Manuel Gottsching ou encore Peter Baumann. Car, contrairement à ce que beaucoup s’autorisent à penser, il ne suffit pas de lancer une ou deux séquences et de jouer dessus, encore faut-il que la sauce prennne. La recette, a priori facile à suivre, est le plus souvent fade, bêtement répétitive et sans intérêt. Mais quand le plat est réussi, c’est un pur régal pour les oreilles. C’est une question d’alchimie. Et c’est l’exploit que vient d’accomplir BySenses (Didier Dewachetere de son vrai nom). Son Frigments/Fragments est un superbe album de musique électronique à la fois atmosphérique, onirique, mélodique et, ce ne sont pas les moindre aspects, original, recherché et personnel. Tout y est brillamment joué, séquencé et rythmé, avec juste ce qu’il faut d’explorations soniques bizarres un peu hors-limites pour intéresser l’oreille et plus qu’assez d’accords grandioses au mellotron pour la ravir. C’est vraiment du beau boulot, à mi-chemin entre le parfaitement planant et le tout à fait passionnant.

Grand fan de new wave dans les années 80, il a d’abord beaucoup écouté les Sisters of Mercy, Simple Minds et U2. Un jour, alors qu’il écoutait distraitement la radio, le générique de l’émission a retenu toute son attention. C’était révolutionnaire, mais le nom de l’artiste n’était pas précisé. Un peu plus tard, il a vu un disque dans un magasin dont la couverture – des personnages munis de jumelles – lui a tellement plu qu’il l’a acheté tout de suite sans même savoir à quoi s’attendre. Il s’agissait de l’album Equinoxe, de Jean-Michel Jarre. Surprise énorme lorsqu’il y a reconnu le générique de l’émission. Enfin, il pouvait mettre un nom sur ces sons : musique électronique. Et par la même occasion, il venait de comprendre que c’était devenu son truc, sa passion pour toujours. Il s’est ensuite tourné vers la musique de Vangelis. Un peu plus tard, c’est encore une couverture intrigante qui a attiré son attention : une jaquette mauve représentant un type assis devant des machines incroyables, et cette seule lettre : « X ». C’est ainsi qu’il a été introduit à l’univers de Klaus Schulze via le fameux album produit en 1978. Mais ça n’allait pas de soi. Il n’avait que 15 ans et il a dû demander de l’argent à sa mère pour pouvoir s’offrir le disque… puis tous les autres ! Puis encore ceux de Tangerine Dream, de Roedelius – il adore Roedelius – et de Michael Shrieve.

BySenses-band

Bien sûr, comme pour la plupart des amirateurs de Jean-Michel Jarre, de Vangelis, de Tangerine Dream et de Klaus Schulze, après y avoir trempé les oreilles, on veut y mettre les doigts. Mais il faut les synthés, les séquenceurs et tout le reste, et tout ceci coûte cher. Il lui a fallu attendre d’avoir son propre appartement pour s’offrir son premier synthé, un Korg MS-20. Très vite, un MS-50 a suivi, malgré son budget limité. Il a d’abord expérimenté ses premiers sons au sein d’un groupe de synthésistes, qui jouaient surtout pour le plaisir. Ce n’est qu’en 2010 qu’il a lancé son projet BySenses, achetant de nouveaux instruments et commençant à enregistrer sérieusement. De plus, Didier Dewachetere est adjudant dans l’armée belge. Comme quoi, sous l’uniforme, il y a toujours place pour les plus beaux rêves de musicien et les plus belles musiques électroniques.

Frederic Gerchambeau

Note 1 : À lire ici une autre chronique de Frigments/Fragments, par Jean-Michel Calvez

Note 2 : Frigments/Fragments a été composé, joué et enregistré par BySenses excepté « Destination Unknown », joué et composé avec Owann. Musicien additionnel : Frakke (batterie sur « OGF »). Pour les connaisseurs, voici le matériel utilisé par Didier Dewachtere : Quasimidi : Polymorph, Rave O lution 309, Quasar (2x) et Cyber 6. Korg : MicroKorg, MS 20 et KAOS. Roland : Gaia et JP 8000. Matériel additionnel : SP 555, M-Audio Axiom et Waldorf Micro Q.

https://bysenses.bandcamp.com

https://www.facebook.com/didier.dewachtere

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