Solar Deity – Reason To Stay

Reason To Stay
Solar Deity
2016
Light Temple Records

Solar Deity-Reason to stay

« Hard rock, hard rock, qui veut du hard rock ? » (simulez le cri d’un vendeur de hot dogs dans un stade de baseball américain pour recréer l’esprit). Eh bien, moi j’en veux. Et j’en veux du bon : « no tepid hard rock allowed« . Les moscovites de Solar Deity m’ont gagné littéralement. Après avoir passé un mois de juin plutôt ordinaire, voire morne côté musique, j’ai décidé de déballer cet album (en fait, je l’avais acheté sur Bandcamp en version numérique et je ne l’avais rapidement écouté que d’une oreille à sa sortie au printemps). Eh bien, ça frappe tout ça… Pour le coup, ce disque est devenu mon chouchou du moment. Du pur bonheur sur platine !

Reason To Stay, le premier LP de la formation russe, a de quoi réjouir le fan de hard rock le plus exigeant. On aurait tendance à penser que le premier album d’un groupe dont on n’a jamais entendu parler (du moins ici, dans l’hémisphère ouest du globe) n’aurait rien pour nous épater. Et pourtant, tous les ingrédients y sont : des airs enlevants qui donnent le goût de fredonner les refrains, une production impeccable digne des grands noms du rock américain, des compositions efficaces et une énergie du diable… Si nous pensons ainsi a priori, c’est que nous ignorons parfois que derrière un premier album officiel se cachent parfois quelques productions antérieures et même parfois un cursus préliminaire constitué de spectacles, de tournées et d’enregistrements de démos. C’est le cas avec Solar Deity. Formé en 2010 au cœur de la capitale russe, le quintet foule depuis longtemps la scène internationale, pigeant dans le répertoire des EP The Way (2011), Seen My Death (2012), de même que quelques versions embryonnaires de leur nouvel album paru en avril dernier. C’est d’ailleurs lors d’une série de tournées à l’étranger qu’est venu le titre de ce nouveau disque, alors que la formation était en escale à l’aéroport de Heathrow, aux prises avec un manifeste mal du pays : « Trouble and adventures haunt me everyday, give me a reason not to run, give me a reason to stay« .

Solar Diety -Band

On ne peut donc affirmer que le groupe est sans expérience. En effet, les membres de Solar Deity ne tombent pas des nues. Le guitariste Ruslan Aleqperov et le batteur Vlad Dmitruk avaient précédemment mené une carrière au sein du groupe deathcore/metalcore One Shot for All alors que le chanteur Peter Salnikov quittait la formation Psychodelic Blues pour se joindre à la formation hard rock telle que nous la connaissons. Ajoutons également que le guitariste Ilya Shemyakin quittait en 2012 pour rejoindre les rangs du groupe punk hardcore Grizzly Knows No Remorse et être aussitôt remplacé par l’actuel guitariste Nikita Zaugolnov.

On ne peut donc continuer de s’obstiner et croire que le groupe n’est constitué que de musiciens inexpérimentés. Et puis, si on tend à alimenter et nourrir vainement cette méprise, on peut rapidement être rappelé à l’ordre en écoutant simplement ce splendide petit bijou qu’est Reason To Stay. Pour ma part, j’y retrouve une quantité de références musicales qui flattent le pavillon de mon oreille (à mon avis, cette zone est au délice auditif ce que le palais est aux plaisirs gastronomiques, prise de poids en moins). À certains moments j’y décèle des influences provenant de Foo Fighters. Dans une certaine mesure, les premiers riffs de guitare au cœur de la pièce « Reason To Stay » me rappellent ceux de Grohl et Smear du temps de Echoes, Silence, Patience & Grace, alors que des pièces telles que « Walls », « Leaving It To Be » et l’introduction de « Silence » me transportent dans l’univers grunge de Soundgarden. On ne peut à tout le moins nier le phrasé commun à Aleqperov et Thayil. Et que dire de cette commutativité indéniable entre « Possibility Of Redemption » et « Moving In Circles » et le répertoire général du groupe américian Mastodon ? Si vous n’y voyez aucune correspondance, c’est que vous ne connaissez pas Mastodon ou qu’il vous faut au plus vite prendre rendez-vous chez l’ORL. Mais quoi… ne me dites pas que vous ne cernez pas dans le solo de « Masked Men » le doigté de Brent Hinds ! Allez, ne soyez pas de mauvaise foi… De la même façon, il est inconcevable d’ignorer la filiation entre le hard rock arizonien de Razer (que j’ai chroniqué plus tôt) et le hard rock slave de Solar Deity.

Enfin, si toutes ces influences sont palpables, le hard rock de Solar Deity est tout même griffé. L’énergie de la formation lui est propre. La façon dont le groupe conjugue le southern rock, le stoner, le rock alternatif et ce flirt structurel avec le progressif est plutôt unique. En fait, il me semble que la Russie n’ait jamais produit pareille musique. Tout ça est franchement américain, tout en étant produit en Europe de l’est. Et puis, honnêtement, qu’est-ce qu’on en a à faire de l’authenticité coûte que coûte quand ce que l’on entend est simplement bon, excellent, génial, voire bandant… Tant que ça déménage avec style, goût et dynamisme, moi, ça me va. Et Solar Deity, eh bien, ça me va comme un gant fait sur-mesure !

Dann the djentle giant

https://solardeity.bandcamp.com

Coup de Coeur C&Osmall

Chronique parue simultanément chez Clair & Obscur (Paris) et Daily Rock (Québec)

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