Live report – Slane à Môtiers 26 novembre 2016
Six Celtes romands revisitent l’Irlande
Slane propose une musique vraie, pure et dédiée aux compositions traditionnelles irlandaises. Loin donc des refrains houblonnés mâtinés de rock et de virilité, style dévoué (et dévoyé) dans lequel ont su exceller d’autres formations célèbres que l’on ne nommera pas. Slane existe depuis six ans- même si certains membres du groupe sont riches d’une expérience plus conséquente- et promène sa musique au gré des salles qui acceptent de prendre le risque de proposer cette musique si belle, si délicate mais parfois exigeante. Trouvères des temps modernes, nos six compagnons puisent dans les recoins les plus sauvages de la verte Erin les titres qu’ils vont jouer, avec respect et passion.
Et c’est parti pour les flûtes irlandaises, les tin-whistles & low-whistles, violons, guitares, mandolines et autres bodhrans. Davantage qu’à un concert folklorique, le public médusé assiste en fait à une reconstitution historique tout autant qu’à une séance de musicologie diachronique. Le souci du détail et la virtuosité des exécutants peuvent faire penser aux travaux les plus pointus de la Canadienne d’origine irlandaise et écossaise Loreena Mc Kennitt, voire aux séquences les plus pastorales des premiers disques de l’Anglais Mike Oldfield (Hergest Ridge, Ommadawn ou même à certaines parties du célébrissime Tubular Bells). Cette volonté de ne pas dénaturer les racines musicales souvent mal exploitées dans la musique contemporaine se retrouve dans d’autres formations actuelles qui savent faire fi de toute concession en proposant des relectures amoureuses de périodes dorées de notre passé. Les Franc-comtois de Motis ou des Meutsè ainsi que les Anglais de Iona ou Solstice essaient, avec conviction et vigueur, de faire revivre ces pans mélodiques parfois oubliés comme avaient su le faire en leur temps les géniaux Malicorne ou autres Fairport Convention.
En ce soir du 26 novembre 2016, Slane va jouer dans une très sympathique petite salle de Môtiers, non loin de la demeure dans laquelle Rousseau était venu se protéger des vicissitudes de la vie citadine, avec un succès mitigé comme l’histoire nous l’aura montré. A côté, c’est le nom de ce lieu d’accueil, chambre d’hôtes, salle de concerts et d’expositions nichée dans le pays de l’absinthe. Pontarlier (en France) et Môtiers (en Suisse) se partagent d’ailleurs la renommée de ce breuvage apprécié par tous, de Van Gogh à Mitterrand. Slane, quant à lui, préfère se faire l’apôtre de la Guinness dont le slogan fameux reste un exemple d’efficacité argumentative : « Guinness Is Good for You ». Propos qui colle parfaitement à la formation romande du reste.
Le concert sera constitué d’une suite de…suites ; autant de medleys intelligemment architecturés, proposés comme de véritables menus autonomes et dont les ruptures de rythme et de timbre sont autant de preuves de la maîtrise acquise par ces amoureux des sons et des ambiances de là-bas. Chaque séquence est présentée à l’auditoire, parfois avec dérision, parfois d’un ton savant mais toujours avec la foi qui sied aux personnes qui savent ce qu’elles doivent à ce qu’elles vivent. Flûtes en l’air et chapeau bas à Slane. Rendez-vous l’année prochaine, même lieu, même époque. Slainthe !
Christophe Gigon
Crédits photographiques : Serge Jeanneret
Eh bien MERCI M. Gigon pour cet article pour le moins flatteur, ça fait plaisir à lire !
Roland / Slane / Mandolines