Into Infernus – Grimoire

Grimoire
Into Infernus
Hollowed Records
2016

Coup de cœur, coup de canon, coup de pied-de-biche dans la gueule. C’est l’impression que j’ai eue à l’écoute de l’album Grimoire du groupe américain Into Infernus. De la puissance, de l’efficacité et surtout… surtout, de l’ambiance.

Troisième opus du groupe originaire de Floride, Grimoire me rappelle inexorablement Midian de Cradle Of Filth, l’un de mes albums préférés de tous les temps dans le metal (question de goût, certes). Claviers en forte présence, basses fréquences soignées et abondantes, guitares véloces et staccato comme tout bon black metal symphonique, screeches, pig squeals et growls en alternance, tout est là pour nous rappeler la ville des monstres mise en concept chez la bande de Dani Filth en 2000.

Les voix d’Into Infernus nous rappellent à quel point Dani Filth poussait jadis la note comme un loup hurlant au sommet d’une montagne dans les Carpates à travers d’épaisses ténèbres hivernales. C’était autrefois, à une époque où l’on n’avait pas encore mis en doute la nature black metal de Cradle. Les voix d’Andrew Zink et Jack Higgs nous donnent froid dans le dos, le screech de l’un rappelle le bruit que fait une pointe de diamant sur du verre et réveille notre instinct primitif face aux cris aigus, alors que le growl de l’autre semble se débarrasser de toute une hargne accumulée depuis les temps anciens, une haine intemporelle de profundis.

En fait, Into Infernus, c’est essentiellement le projet d’un seul homme : Andrew Zink. Le jeune homme de 26 ans est un multi-instrumentiste dément. En plus d’être chanteur et compositeur au sein du groupe metalcore/djent Akeldama depuis 2011, notre one-man band occupe ses temps libres à la production (l’enregistrement, le mixage et la prod du premier album d’Into Infernus, c’est lui), en plus de créer de toute pièce la musique à la fois infernale, passionnée et démente d’Into Infernus depuis 2013. Faites le décompte : 3 albums-monstres en 3 ans ! Des groupes d’un déploiement équivalent tels que feu Anorexia Nervosa et les légendaires Dimmu Borgir mettent généralement 3 ans à écrire et produire un seul disque (notons pour la petite histoire que Dimmu Borgir n’en a pas sorti depuis 2010 et qu’un album est prévu pour l’automne 2017).

Voix, claviers, guitares, basse, batterie, Zink assure tout ça. Et l’on pourrait croire que l’une des parties instrumentales doit inexorablement souffrir de cette polyvalence, car aucun multi-instrumentiste n’est parfait (chacun a généralement son talon d’Achille). La batterie est souvent quelconque, alors que la basse fait tout simplement le travail, sans grand éclat. C’est du moins ce que l’on peut souligner bien souvent. Mais ici, c’est un tout autre chapitre ! Zink martèle la batterie comme un Nilcas Vant (ex-Anorexia Nervosa) ou un Nicholas Barker (ex-Cradle Of Filth, ex-Old Man’s Child, ex-Monolith, ex-Dimmu Borgir, ex-Lock UP, ex-Noctis Imperium et actuel Liquid Graveyard). Salve de double pédale de grosse caisse (double base-drum), usage fulgurant des cymbales et descentes époustouflantes… Côté batterie, ne cherchez pas un défaut à l’exécution : il n’y en a pas. Zink est un batteur complet !

Côté guitares, on retrouve la même ingéniosité chez Zink que chez les Gianpierro Piras (alias Gian Pyres), Stéphane Bayle et Galder de ce monde (et pour qui connaît ces guitaristes, on est loin de parler de gugusses !). Survoltées, staccato et véloces comme la foudre zébrant le ciel, les lignes de guitare d’Into Infernus sont black metal à souhait, exploitant les aigus comme le veut la tradition black. Par moment, il y a également dans ces jeux de guitares quelque chose d’Akeldama, quelque chose de metalcore et de djent. On passe donc d’un registre aigu très black, à un autre relativement grave façon djent, notamment dans les pièces « Felled In Ire » et « Painted In Red ». Il s’agit donc d’un registre très large et très complet qui côtoie l’univers très étendu du metal progressif.

Côté basse, même chose : elle est efficace et ne se contente pas de suivre la guitare note pour note. Les parties de basse sont fort bien exécutées, me rappelant à plusieurs reprises le phrasé de Robin Mark Eaglestone (alias Robin Graves) dans la chanson « Her Ghost In The Fog » (comparez la pièce de COF avec l’intro de « Regret Of Frey Valor » et osez me dire que je fais erreur !). C’est d’ailleurs cette basse qui valide mon rapprochement entre l’album Midian et Grimoire (hormis les screeches de « The Sowing Tear » et « Painted In Red » qui eux aussi rappellent le chant de Dani sur ce même album). Les bridges où l’on discerne très nettement la basse, sont fort réussis. On ne parle pas d’un bassiste à quatre sous.

Pour les synthés, on parle également d’un talent inné pour l’ambiance, talent dont je n’avais pas été témoin depuis Martin Powell (lui aussi ancien membre de Cradle Of Filth). Le tout rehausse d’un cran la tension de chaque morceau, remplit les espaces hertziens pour donner cet aspect orchestral et grandiloquent qui n’a pas son pareil dans l’univers musical. On serait d’ailleurs porter à croire que ce genre de musique veut honorer la volonté des grands musiciens de l’époque romantique, saturant chaque particule sonore afin de palier à l’horror vacui et conférer à la musique un caractère lyrique fort et universel.

Pour les voix, c’est pareil. Le tout est sans accroc. Que vous aimiez ou non les screeches et les growls, vous ne pourrez reprocher aux parties vocales de Grimoire de manquer d’intensité et de technique. Un certain Dani Filth a lui-même dû cesser d’utiliser cette technique sous peine de perdre littéralement la voix ! Non, bien franchement, Into Infernus me jette par terre. Ça débute une année metal 2017 avec brio !

Pour la cause, j’accole un 10 sur 10 à l’œuvre, très aboutie, fort intense et drôlement bien dosée. Les opus précédents m’ont plu, mais cette fois c’est carrément le coup de foudre ! J’y retrouve le meilleur de Diabolical Masquerade (surtout l’album Death’s Design), Dimmu Borgir, Cradle Of Filth, Fleshgod ApocalypseForay Between Ocean et Anorexia Nervoca, mes essentiels du metal symphonique. Pour qui aime le genre grandiose, l’orchestration, la puissance et les ambiances noires, Into Infernus deviendra votre must.

Dann ‘the djentle giant’

https://www.facebook.com/IntoInfernus/?fref=ts

http://hollowedrecords.com/into-infernus-grimoire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.